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NON, MONSIEUR HAMON, LE DEBAT SUR LES RYTHMES N’EST PAS CLOS...
(auteur Greudin, domaine public)
Avec sa lettre aux parents d’élèves, monsieur Benoît Hamon ne doit pas croire qu’il a clos le débat sur la mise en application des rythmes scolaires dans les écoles de France pour la rentrée 2014.
Ce n’est pas son courrier aux parents qui masquera l’indigence d’un décret qui est en train de continuer de mettre en péril la refondation de l’école. Succédant à son collègue Vincent PEILLON, il aurait pu en profiter pour rectifier les erreurs faites et ainsi réécrire le décret après une mise à plat de la situation et en prenant le temps de le faire en mettant en place un nouveau calendrier.
Il a préféré "bricoler" en apportant quelques aménagements mineurs tout en maintenant l’essentiel du calendrier de mise en place de son prédécesseur et sans rien changer sur le fond aux inepties contenues dans le décret. (Voir, sur ce blog, mes écrits précédents)
Des solutions étaient possibles pour sortir de l’impasse avec un calendrier qui permettait de respecter la construction de vrais projets là où il n’y en avait pas vraiment. C’était aussi, enfin, respecter les partenaires que sont les enseignants et les parents et leur permettre d’être vraiment acteurs de l’élaboration sur le terrain de chaque école de projets globaux véritables. (Voir mes propos précédents du 1er mai 2014 : http://quaiducitoyen.eklablog.fr/decret-sur-les-rythmes-ce-qu-on-pourrait-faire-a107713706)
NOMBRE DE POINTS DE LA LETTRE DU MINISTRE ME POSENT QUESTIONS
Monsieur le ministre HAMON écrit :
« Autour des nouveaux temps scolaires se met en place, pour l’enfant, dans chaque école, un projet éducatif global. »
L'impression a été donnée que les décisions d'organisation prises ici ou là ne seraient que positives pour l'enfant. Mais ça n’est qu’une impression.
Il y a eu, certes ,souvent, information des parents et des enseignants sur des organisations décidées par les collectivités locales, mais souvent aussi aucun vrai travail de fond sur des projets globaux entre les partenaires de l’école.
Je le disais dans un de mes articles précédent : « Annoncer la concertation tout en disant que le décret sera appliqué à la rentrée 2014 pour toutes les écoles, vu le temps qu’il restait à courir d’ici la fin de l’année, c’est se moquer des parents et des enseignants et faire croire à une concertation qui n’aura pas le temps de se mener. » « La fin de l’année scolaire avec sa surcharge de travaux à faire dans les écoles (passage de classes, orientation, ...) n’est pas propice à permettre de revenir sur des projets dans le cadre d’une vraie concertation de tous les partenaires.
Je lisais ce matin dans la Voix du Nord le titre de la "Une": Rythmes scolaires: encore des remous". A rendre pour le 6 juin 2014, les projets n'ont pu être réexaminées partout vu le laps de temps attribué ce qui confirme ce que je disais précédemment. Et ce n'est qu'un exemple pour une région. Ailleurs en France , c'est pareil. Il suffit de parcourir ici et là la presse régionale. Des délais sont demandés. Qui peut croire qu'on allait pouvoir revoir sérieusement les projets afin qu'ils prennent en compte la globalité des rythmes de l'enfant là où ça n' a pas été fait c'est à dire dans de très nombreuses écoles et communes et ceci parce que le décret initial n'en a pas mis les conditions obligatoires?
Et je ne parle pas des écoles où la lassitude des équipes pédagogiques, la fatalité, la démobilisation... ont fait que tout est laissé en l'état sachant très bien qu'en ce qui concerne le temps scolaire, rien ne changera vraiment à la rentrée pour les apprentissages.
Une vraie concertation ne se fait pas à la va vite.
La concertation (et la réflexion) pour bâtir un projet éducatif global, là où elle n’a pas été menée, n’aura pas eu le temps d’être construite sérieusement. C’est le lot de milliers d’écoles. On est et sera très loin de ce qu'on aurait pu construire pour mettre en place une réforme digne de ce nom du fait d'un décret inepte. Il n'y a donc pas de réforme.
Comme je le disais lors de sa parution, ce décret a signé l'avortement d'une partie essentielle de la refondation. Monsieur Hamon a continué d'y contribuer en s'entêtant à ne pas vouloir réécrire un texte qu'il était facile d'amender avec le courage nécessaire pour l'intérêt des enfants y compris en prenant le contre pied des intérêts souvent égoïstes des adultes et des résultats des sondages.
Monsieur Hamon a beau affirmer que « les équipes académiques ont travaillé, dans chaque commune, main dans la main avec les enseignants, avec vos représentants et avec les élus locaux pour que la modification des temps scolaires se fasse dans les meilleures conditions ».
Ce ne sont que des mots. Il fallait mettre les conditions pour que cela se fasse. Des réunions ont certes eu lieu mais pas forcément dans les meilleures conditions indiquées car souvent « à la va vite ».
Mais il ne faut donc pas croire que les projets ont eu le temps d’être réexaminé sérieusement depuis sa nomination. Le travail « main dans la main » n'est qu’une erreur de langage et bien naïf est le ministre s’il croit vraiment ce qu’on lui a rapporté.
Pour 2014, nombreux sont encore les projets qui n’ont pas été vraiment concertés, l’organisation retenue par le DASEN étant dans la quasi totalité des cas celle proposée par la commune.
Le problème est que le décret a été rédigé de telle manière à ce que rien n’institue ni oblige au niveau de chaque commune le dialogue et le projet partenarial concerté. De nombreux exemples l'attestent dans les faits. Monsieur Hamon ne change rien à tout cela, malgré ses déclarations sur la concertation.
Le compte-rendu d’une enquête publié le 12 février 2014 par le SNUIpp/FSU, syndicat des enseignants du premier degré est riche d’enseignements à cet égard:
(http://www.snuipp.fr/IMG/pdf/2014_02_12_contre_rapport_snuipp_rythmes_tip_top-20140212164055.pdf)
Il a été réalisé après les retours de questionnaires de 3 568 enseignants qui ont dû appliquer la réforme à la rentrée 2013 et 3906 écoles qui devront l’appliquer en 2014 :
- pour 2013, 60 % des enseignants attestent qu’il n’y a eu pas de prise en compte de l'avis du conseil de leur école
- pour 2014, 72 % des Conseils d'école ont été consultés. Mais, parmi eux, 31,29 % n'adhèrent pas au projet remonté par la mairie. Ils sont donc moins d’un sur deux au final à avoir donné leur accord.
L’enquête relève d’autres nombreux points positifs et négatifs qu’il aurait été bon d’au moins prendre en considération. A lire pour faire la part des choses.
Monsieur Hamon écrit encore :
« La réussite de votre enfant est notre objectif commun. C’est pourquoi, à la prochaine rentrée, tous les écoliers bénéficieront d’une organisation du temps scolaire plus propice à l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul.
L’adoption de ces nouveaux temps scolaires vise à faciliter l’acquisition par chaque élève des savoirs fondamentaux et à développer en chacun d’eux un véritable goût pour apprendre... »
« La nouvelle organisation de la semaine scolaire doit contribuer à donner aux enfants confiance en eux et en leur capacité à bien apprendre. En effet, cinq matinées au lieu de quatre, c’est, chaque semaine, un temps supplémentaire pour travailler dans de bonnes conditions, le matin étant le moment de la journée où l’attention des enfants est la plus soutenue... »
Verbiage..., monsieur Hamon confirme les errements de son prédécesseur.
En quoi l’organisation imposée est plus propice à l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul ? Aucun argument n’étaye ces propos. En quoi ces « nouveaux temps scolaires favorisent le goût pour apprendre » ? Cela relève d’un verbiage généraliste sans fond qui montre bien que le ministre ne sait pas très bien ce que sont les rythmes des enfants et surtout ce que sont les conditions qu’il faudrait mettre en oeuvre pour améliorer les apprentissages,... Ca ne se décrète pas par une simple organisation horaire.
Où seront les changements dans les classes au niveau des pratiques permettant un meilleur équilibre des temps et des moments d’apprentissages, au niveau de la prise en charge des enfants et notamment ceux en difficulté ? Parler d’attention ne suffit pas... Les conditions d’apprentissage, l'attention,... sont bien plus complexes que ce décrit le ministre et qui relève du simplisme.
(Voir mes propos pour ne pas me répéter : http://quaiducitoyen.eklablog.fr/rythmes-scolaires-hamon-un-cautere-sur-une-jambe-de-bois-a107691460)
Monsieur le Ministre de l’Education nationale affirme dans son courrier :
« La nouvelle organisation de la semaine donne ainsi aux élèves et aux enseignants un emploi du temps plus harmonieux... »
« Le matin d’école supplémentaire permet également une répartition plus équilibrée des heures de classe tout au long de la semaine. »
C’est du raccourci pour le moins rapide. Qu’en est-il dans des grandes villes où les journées ne sont pas raccourcies et restent à six heures.
L’emploi du temps hebdomadaire serait plus harmonieux !
Alors qu’il dise pourquoi le mercredi matin travaillé a été choisi au lieu du samedi qui n'est que dérogatoire? Pourquoi le nouveau ministre n’est-il- pas revenu sur cette aberration surtout quand il permet de regrouper des activités périscolaires le vendredi après-midi ce qui est une bonne idée. Mais elle a tout de suite été détruite pour les écoles qui ne travaillent pas le samedi matin rallongeant ainsi d’un après midi le week-end sans école. La vraie solution pour que ça marche aurait été d’instituer le samedi obligatoire au lieu du mercredi. Mais il a été tenu compte des sondages préférentiels des adultes.
Tout cela manque de cohérence.
A aucun moment, je n’ai entendu que le nouveau ministre allait lancer une grande campagne d’information nationale de fond sur le rythme veille/ sommeil dont le respect est une des conditions indispensable de l’équilibre des enfants pour retrouver la classe le lundi dans de bonnes conditions pour apprendre. Rien n’a été fait par l’Etat en direction des parents ni d’ailleurs auprès des élus locaux sur le sujet depuis que l’on parle de la réforme des rythmes dits « scolaires ». L’appellation même est réductrice et témoigne de la méconnaissance du sujet par nos soi-disant élites nationales.
Monsieur Vincent Peillon s’est donc bien gardé d’informer. Monsieur Hamon fait de même.
Une information de grande ampleur était pourtant fondamentale pour accompagner avec les parents la mise en place d’une réforme sur les rythmes car si les parents n’ont pas les connaissances nécessaires sur le rythme veille-sommeil de leur enfant, ....et bien on ne changera rien à la fatigue de ceux-ci y compris par la mise en place d’une cinquième matinée et d’organisations horaires journalières « carcan » et inadaptées.
Et pourtant, le nouveau ministre écrit aussi : « L’école a trop souvent changé en fonction de l’intérêt des adultes et non de celui des enfants. ... »
Comme son prédécesseur, Monsieur Hamon n’a cependant pas eu le courage de revenir sur le samedi matin dérogatoire et a préféré garder le mercredi matin travaillé. Sans doute a-t-il préféré, lui aussi, s’inspirer des sondages auprès des adultes /parents mal informés pour savoir qui préfère le mercredi ou le samedi pour cautionner une semaine de 4 jours et demi bancale plutôt que de prendre une décision qui allait dans l’intérêt de l’enfant que de tenir compte de la rupture néfaste du rythme veille/ sommeil du week-end.
Comme son prédécesseur, Monsieur Hamon s’assoit sur les recommandations de l’académie de médecine et des chronos biologistes et ne fait rien pour mieux informer les parents.
« Depuis la suppression en 2008 de la demi-journée du samedi matin, notre pays présentait à la fois le nombre de jours d’école le plus faible d’Europe et la journée de classe la plus chargée. »
Ce que dit monsieur Hamon est vrai mais c’est incomplet.
Si on constate les meilleurs résultats obtenus dans d’autres pays comme par exemple la Finlande (608heures annuelles pour les 7 à 8 ans, 640 pour les 9 à 11 ans), le Japon (709 heures et 770, l’Allemagne (635 et 790) et qu’en France c’est 840 heures pour les 7 à 8 ans et 902 pour les 9 à 11 ans, cela me semble plus complet pour commencer une analyse de notre situation au lieu d’en rester à des affirmations partielles qui ne remettent rien en cause sur le fond. Il y a beaucoup plus d’heures annuelles en France et pourtant « dans le primaire entre 2001 et 2006, la France est passée du 18e au 27e rang, avec 32% des écoliers français jugés faibles ou très faibles pour une moyenne européenne de 25%. »(OCDE 2010).
Ca prouve bien que quelque chose ne tourne pas rond dans le système éducatif français. Mais ce n'est pas nouveau et même sans PISA on aurait pu s'en apercevoir au quotidien dans les écoles.
Il faut donc avant toute chose considérer la qualité de ce qui sera fait durant ces heures, avec la cohérence et le contenu nécessaire des programmes, les organisations pédagogiques et les moyens nécessaires.
Si refondation il y a, elle sera en grande partie pédagogique ou ne sera pas.
Et il y a aussi, bien sûr, les moyens qui n’y sont pas depuis des années. J’y reviens plus loin mais c’est lié.
Pour ce qui concerne la QUALITE, seuls des programmes enfin dépoussiérés de leurs lourdeurs, de leurs incohérences et de leurs inutilités permettront de régler nombre de problèmes actuels de notre système éducatif y compris les rythmes hebdomadaires, la durée de l’année scolaire, les vacances... parce qu’enfin on pourra estimer combien d’heures il faut consacrer à l’enseignement et qu’on pourra ainsi déterminer les périodes durant lesquelles l’élève sera enseigné dans le cadre d’une continuité cohérente.
Il ne s’agit pas, comme on l’a vu trop souvent ces derniers mois, de partir d’un nombre d’heures théoriques annuels qui ne repose que sur des considérations éculées qui ne pourront en rien aider à refonder notre système éducatif. Il faut d’abord se préoccuper du contenu de ce qui va devoir être appris.
Malheureusement, depuis ce 9 juin le ministre de l'éducation nationale se retrouve avec un Conseil supérieur des programmes sans président. Alain Boissinot, qui assurait cette fonction depuis octobre 2013, vient de démissionner. On ne sait pas vraiment trop pourquoi. Mis en place beaucoup trop tardivement en octobre 2013, cette instance avait pour mission de définir « de nouveaux contenus d'enseignement et l’articulation entre programmes et nouveau socle commun », éléments clés de la loi.
(Voir mon avis sur la constitution de cette instance sur http://quaiducitoyen.eklablog.fr/refondation-de-l-ecole-quel-avenir-2-a91985793)
En tout cas, la refondation a un nouveau ralentissement et de taille !
Ce n’est pas sérieux !
EN CE QUI CONCERNE LES MOYENS POUR L’ECOLE
C’est, avec l’incohérence des programmes, un des facteurs de la baisse de réussite de nos élèves depuis plus de 10 ans.
L’ex-majorité UMP au pouvoir durant la dernière décennie (et même avant) a montré largement par les actes sa médiocrité quant à l’intérêt qu’elle avait des enfants et des jeunes élèves de ce pays. Elle a appuyé une gestion comptable en matière d’éducation en prenant les élèves et les enseignants pour des pions au service de la « sainte gestion »… je n’ai pas dit « saine gestion ».
Il faut quand même bien rappeler, pour tous les degrés d'enseignement, les réformes souvent contradictoires depuis des décennies (je les ai vécues), le maintien continue d' une inégalité injustifiée de statuts entre les personnels notamment du premier degré mais aussi par rapport à ceux du second degré, des salaires non motivants, une mauvaise formation des enseignants puis la suppression de celle-ci, les diplômes universitaires des profs comme garant d'une formation pédagogique qu'ils n'ont pas, les tentatives répétées de réduction de moyens de traitement de la grande difficulté (RASED), une réforme des lycées inexistante, des programmes manquant de cohérence, la non prise en charge réelle et immédiate de nombre d'élèves pour traiter la difficulté ordinaire, ..... J’en passe.
En bref, nous payons ou plutôt les élèves payent les erreurs d'une politique de l'éducation souvent élitiste qui, depuis de nombreuses années n’est pas à la hauteur des enjeux et accentue les inégalités et les discriminations. Ce n'est pas moi qui le dit. Le bilan est là, incontestable, avec, au fil des ans, de plus en plus d’élèves laissés sur le bord du chemin avec leur difficulté et des jeunes qui sortent chaque année sans la formation dont ils auraient besoin pour trouver un travail.
Là, ce n'est pas le gouvernement et le ministre actuel qui sont en cause.
Mais, il ne suffit pas de se contenter d'utiliser PISA pour dire que les gouvernements précédents ont la responsabilité des mauvais résultats éducatifs actuels. On le sait depuis longtemps.
Il faut plutôt accompagner la Refondation de l'Ecole des véritables moyens nécessaires au fonctionnement de celle-ci et notamment concrètement tout de suite au niveau des conditions de travail des élèves des maîtres.
Monsieur Hamon déclare dans sa lettre aux parents :
« Elle (L’adoption de ces nouveaux temps scolaires) est complémentaire de l’effort que nous poursuivons depuis deux ans en matière de recrutement, de formation des maîtres ou encore de modernisation de la pédagogie...
Le recrutement a du mal à se faire ce qui n’a rien d’étonnant vu l’attractivité qu’on fait de ce métier. Au lieu d’améliorer les conditions d’exercice, de mettre à niveau en toute justice les salaires des professeurs d’école avec celui des professeurs du second degré, le gouvernement mégote. Résultat : on recrute en abaissant la moyenne d’admission au concours de professeurs des écoles, sans doute pour avoir du personnel performant et de qualité à moindre coût. (Voir mon article du 25 février 2014 sur le sujet : http://quaiducitoyen.eklablog.fr/priorite-a-l-ecole-primaire-a106671196). On peut aussi se poser la question du processus de recrutement, du niveau absurde des diplômes pour être recruté et le contenu de la formation initiale qui a encore besoin d'être travaillée pour être vraiment professionnelle.
La formation continue est restée au point mort depuis deux ans alors que ce devrait être le FER DE LANCE, avec la formation initiale, de la "Refondation de l’école" qui doit être avant tout pédagogique.
Les moyens sont insuffisants.
Je rappelle qu’il est toujours attendu l’amélioration concrète des conditions d’apprentissages pour les classes qui sont encore chargées en effectif. Ca fait aussi partie des conditions de la mise en place d’une pédagogie qui prend en charge tous les élèves pour leur réussite.
En ce qui concerne la mesure « plus de maîtres que de classes » ce ne sont pas les 400 postes créés pour 48 000 écoles qui ont apporté une vraie amélioration.
Une misère !
Quand aux RASED dont on avait fomenté la disparition sous l’ère Fillon/ Sarkozy en laissant des milliers d’enfants en grande difficulté sur le bord de la route, où va-t-on pour la rentrée 2014 alors qu’on sait que les 100 RASED recréés sont une goutte d’eau dans l’océan des besoins et par rapport à tout ce qui a été détruit ?Le ministre pourra rétorquer que 60 000 postes seront créés pour l’éducation nationale. C'est bien mais cela ne suffira pas. Tout le monde sait que le nombre d’écoliers va augmenter.
Combien de postes pour le primaire ? Pour le moment c’est insuffisant pour l’accueil en maternelle comme par exemple dans l’académie de Lille où on attend d’être revenu au niveau de la moyenne nationale plutôt que de conforter l’accueil : Les chiffres, toujours les chiffres de nos technocrates nationaux. Pendant ce temps on y refuse des élèves qui partent bien sûr vers le privé...qui lui les accueille. Bizarre non ?
Pour qu’on puisse mettre en place une meilleure prise en charge des élèves dans le cadre de la formule « plus de maîtres que de classes » il faudrait créer des milliers de postes en plus sinon la mesure ne sera pas opérationnelle. Tout cela bien sûr avec en parallèle une formation continue de « choc » pour faire évoluer les pratiques ce qui n’est pas malheureusement pas le cas depuis deux ans. Ça traine...
Voilà donc, à mon sens, les vraies priorités concrètes qui doivent être impulsées d'urgence au niveau de l’école primaire.
(Voir également un modeste contribution sur http://quaiducitoyen.eklablog.fr/refondation-de-l-ecole-quel-avenir-partie-3-l-ecole-primaire-a92531519 et http://quaiducitoyen.eklablog.fr/refondation-de-l-ecole-quel-avenir-2-a91985793)
Arrêtons les slogans et passons aux actes !
Le gouvernement pourra dire que l’argent manque.
C’est un point de vue que je ne peux pas partager. Les choix budgétaires du gouvernement ne sont pas les bons. Et il n'y a pas que moi qui le dit: des élus, des experts proposent d'autres solutions pour d'autres orientations qui ne soient pas celles actuelles qui nous amènent à l'austérité.
Je l’ai dit par ailleurs, pour trouver des recettes supplémentaires on doit mettre vraiment les moyens, par exemple, de recouvrer les milliards de la fraude fiscale. Ce n’est pas le cas actuellement.
Il semble que pour le pacte de responsabilité, on manie les milliards avec plus de générosité...pourquoi ne le fait-on pas aussi pour l’éducation ? A quand le pacte Educatif ? (On appelle cela aussi « Refondation de l’Ecole » mais sans les moyens financiers à la hauteur)
Il faut pour cela sortir de certains vieux schémas d'organisations et de statuts désuets et inefficaces conservées dans le formol jusqu’à nos jours par nombre de technocrates mais aussi de politiciens dépassés et sur lesquels notre Ecole est fortement fondée depuis des décennies.
Les enseignants devront aussi montrer l’exemple de leur ouverture à d’autres schémas d’organisation horaires, de service, de prise en charge des élèves, de pédagogie. Certains d’entre-eux ont déjà pu le faire sur le terrain à tous les niveaux de l’Ecole. Ils n’ont malheureusement pas toujours été aidés et écoutés par l’éducation nationale et les hiérarchies qui ont rarement favorisé leurs initiatives et leurs innovations...
POUR CONCLURE : LA CONFIANCE N’EST DONC PAS RETABLIE
Dans sa lettre, sous le couvert d’assouplissements à la marge , monsieur Benoît Hamon veut faire croire que tout va bien et que tout ira bien à la rentrée et ainsi prétendre calmer les humeurs. Il veut clore le débat estimant qu’il a eu lieu.
Peut-être croit-il que l’été et les vacances feront oublier et permettront de tourner la page ?
Ses affirmations généralistes ne convaincront pas, celles et ceux qui, parents et enseignants, peuvent témoigner de la manière dont cela s’est passé et se passe sur le terrain de nombreuses écoles.
Cela rajoutera juste au malaise surtout quand on sait que dans nombre de villes et villages on ne sait même pas encore comment cela se passera à la rentrée. On s’aperçoit par contre que le ministre a clos le dialogue de manière autoritaire en affirmant qu’ à la rentrée , dans toute la France, la "réforme" des rythmes dits « scolaires » allait être appliquée. Ce n'est de toute façon pas une réforme.
Etant, pour l’essentiel, en accord avec les objectifs initiaux fixés par le ministre Peillon, la déception que j’ai pu ressentir s’est marquée au fur et à mesure des semaines et des mois car les actes n’ont plus été progressivement en conformité avec les grandes déclarations d’intentions de l'ancien ministre de l’éducation nationale et du président de la république.
J’écrivais, il y a plus d’un an déjà, "que la "Refondation" que Vincent Peillon était censée défendre, s’écraserait, du fait de son décret, sur le mur ou de l’indifférence due à la démobilisation ....à moins que ce ne soit celui de l’écœurement et du désenchantement des acteurs de terrain et qui seront à la hauteur des espoirs qui ont été suscités…et défaits". C’est ce qui s’est produit.
Si la confiance n’est pas au cœur de la rénovation, celle-ci ne se fera pas.
La véritable refondation de l’école est toujours en danger d’asphyxie. (Comme je le disais le 31 mai 2013 http://quaiducitoyen.eklablog.fr/la-refondation-de-l-ecole-est-en-danger-d-asphyxie-a91422307)
Il est temps de changer de cap pour aérer le bateau et aller vers une vraie "Refondation" qui soit, par les moyens mis en oeuvre, à la hauteur des enjeux pour l'avenir de nos enfants.
Il est temps de revenir aux objectifs que devraient être ceux d'une gauche humaniste qui oeuvre pour le peuple. Je ne dis pas que toutes les décisions prises sont mauvaises. Il faut faire la part des choses. Mais c'est insuffisant compte-tenu des attentes et des besoins. Payer plus d'impôts pour quoi faire? En tout cas ça n' a pas l'air d'être pour améliorer le fonctionnement de nombre d'institutions publiques.
Les objectifs fixés par une nouvelle idéologie - je ne veux même pas donner de nom tant elle est floue - trahissent dans leur mise en oeuvre les promesses de campagne de celui qui a été élu en mai 2012, entrainant le pays dans l'austérité et la perte de confiance justifiée d' électeurs qui s'estiment, comme moi, trompés.
Et c'est très grave pour l'avenir.
Patrick PATTE