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PREMIÈRE MINISTRE: FEUILLE DE ROUTE OU DE DÉROUTE ?
Un mauvais jeu de mots pour ce titre ? Pas sûr car tout ou presque concourt à ce que le programme imposé par le Chef de l’État à sa Première ministre ne soit qu’une apparence de plus sans les moyens nécessaires pour qu’il se concrétise effectivement : moyen d’acceptation par le parlement, aucune méthode pour faire revenir les organisations syndicales à la table des négociations sur le travail , méfiance des acteurs de l’éducation et de la santé vis à vis de ce que je nommerai le flou artistique d’objectifs sans rapport avec les situations concrète de l’état du quotidien du personnel face aux besoins réels de la population.
Seules les organisations patronales ont participé à la réunion du mardi pour recoller les morceaux de ce qui reste ou pas des liens avec les partenaires sociaux maltraités par le mépris d’un président à la limite d’un despotisme qu’il croit éclairé.
( Auteur overjupiter, CC0 domaine public)
LES ANNONCES
Lors de sa déclaration solennelle à la télévision le président a annoncé trois grands axes que la première ministre a donc repris servilement et qu’elle doit mettre en œuvre concrètement ce qui montre bien qu’elle n’a effectivement pas été à l’initiative de ce qui devrait être son rôle à savoir gouverner.
D’ici l'été elle doit remettre en route une machine d’état grippée, démantelée, un fonctionnement qui n’a pas la confiance.
Elle devra chercher des majorités sur les textes de loi à l’assemblée nationale, gouverner avec des décrets et tenter de faire que les partenaires sociaux participent aux chantiers ce qui est loin d’être gagné… Sur les 100 jours annoncé d’ici là le pays est à l’arrêt des participations des partenaires sociaux.
Le chantier du travail :
« Nous avons des résultats inédits et indiscutables. C'est le fruit des transformations de ces dernières années. […] Le travail doit encore mieux payer. Une série de négociations doit se tenir. Mieux partager la richesse, trouver des solutions à l'usure professionnelle, accroître l'emploi des séniors. Ce nouveau pacte de la vie du travail doit être trouvé dans les semaines qui viennent. »
Pourquoi donc ne pas avoir mis ce chantier sur la table et travaillé méthodiquement avec les partenaires sociaux au lieu de pondre une loi scélérate de réforme des retraites avec le mépris que l’on sait vis à vis des syndicats et de la population ?
On a mis la charrue avant les boeufs et Elisabeth Borne a beau proposer des rencontres sans sujet tabou , la défiance est dans la place. Le pouvoir n’est plus crédible pour lancer un chantier d’autant qu’aucune méthode, base et moyen de travailler n’ont été définis ou proposés.Il en est de même pour les autres chantiers annoncés.
(Marianne de la démocratie, Armel Le Coz, Attribution (CC BY 2.0)
« Le deuxième chantier est celui de la justice et de l'ordre républicain »
« Nous continuerons à recruter plus de 10.000 magistrats. Lutter contre toutes les fraudes avec des annonces fortes dès le mois de mai. Nous renforcerons aussi le contrôle de l'immigration illégale.
Un deuxième chantier au flou artistique qui ne contient rien de vraiment concret de plus que ce qui a été jusqu'ici entamé timidement. La première ministre annonce de plus que la loi sur l'immigration ne sera pas de suite à l'ordre du jour...
« Le troisième chantier est celui du progrès pour mieux vivre, que chacun d'entre nous retrouve la certitude que nous enfants vivront une vie meilleure ».
Une formule passe partout qui ressemble à d’autres formules déjà énoncées par Emmanuel Macron.
« l'Education nationale doit renouer avec l'ambition d'être une des meilleures d'Europe. Aussi, dès la rentrée, notre école va changer à vue d'oeil : pour les enseignants, qui seront mieux rémunérés et auront plus de liberté, pour les élèves, qui seront davantage accompagnés en français et en mathématiques pour leurs devoirs, et pratiqueront plus de sport à l'école : pour les parents qui verront le remplacement systématique des enseignants absents. »
Une école qui change « à vue d’œil » ? Formule hasardeuse et peu adaptée pour une école qui a besoin d'être réformée en profondeur et pour laquelle il faut un vrai plan de mesures en cohérence à court, moyen et long terme.
Rien de nouveau puisque tout cela a fait l’objet d’annonces qui sont loin de satisfaire les acteurs de l’éducation.
Le premier mandat d’Emmanuel Macron à la tête de l’état n’a en aucune manière amélioré réellement et significativement la prise en charge des élèves. Sous le ministre Blanquer tout a été fait , un peu d’ailleurs à l’image de cette réforme, sans consulter les acteurs de terrains et il a été imposé les lubies d’un homme lui aussi sûr de sa « science »alors qu’il mettait en avant des méthodes ou des pédagogies ciblées et partisanes ce qui en la matière est une hérésie. ( Lire entre autres : http://quaiducitoyen.eklablog.fr/education-nationale-la-casse-a-macron-via-blanquer-chapitre-un-a159819964 ou
http://quaiducitoyen.eklablog.fr/le-quinquennat-commence-mal-pour-l-ecole-a131557396) Je rappelle que ce ministre a même soutenu le fantasme gadget de l’uniforme à l’école qui de temps en temps revient sur le devant de la scène médiatique comme si cela pouvait être le fer de lance de mesures pouvant réaliser l’égalité entre les élèves.(http://quaiducitoyen.eklablog.fr/buzz-fantasme-de-l-uniforme-a-l-ecole-le-retour-1-sur-2-a213689491)
Pour le reste il ne suffit pas d’affirmer comme le fait le président Macron que notre école doit « renouer avec l’ambition d’être l’une des meilleures d’Europe » car avec les vagues intentions qu’il formule on est loin du compte.
Assurer le remplacement systématique des enseignants absents n’est pas une mesure exceptionnelle . Pourquoi n’en a-t-il pas pris les moyens depuis six ans qu’il est au pouvoir ? Annoncé comme une « grande nouvelle » ce devrait être la normalité depuis longtemps alors que les gouvernementsprécédents n’ont eu de cesse de supprimer les postes nécessaires à ces remplacements. Le ministre Pap Ndiaye ne vise d’ailleurs que le collège et le lycée où des milliers d’heures par an manquent aux élèves mais rien n’est annoncé pour le premier degré où la règle est souvent la répartition des élèves dans les classes. Et ça fait des années que cela dure…
Des annonces donc mais en face il n’est pas dit comment cela se fera si ce n’est demander aux enseignants du second degré de faire des heures supplémentaires sans assurer de recrutement prévisionnel pour constituer des brigades sérieuses de personnels formés aux remplacements.
Ce n’est pas en se contentant de ce type de mesures qu’on palliera aux faiblesses actuelles de notre système éducatif qu’il faut refonder comme Hollande l’avait annoncé mais qu’il n’a pas fait.
Ce n’est pas une heure d’étude accompagné qui résoudra les problèmes d’apprentissages, l’aide aux élèves en difficulté mais bien une profonde refondation de l’école et une formation des maîtres digne de ce nom, formation qui est actuellement quasi inexistante qu’elle soit initiale ou continue. Bien au contraire on est en train de casser les RASED sous prétexte que les CP ont été dédoublés ce qui prouve bien que le ministre précédent et celui actuel n’y connaissent rien en matière de prise en charge des élèves et de leurs difficultés.
De la comm, rien que de la com...
En ce qui concerne la hausse des salaires, on a déjà entendu cette musique sous un certain Blanquer ….qui promettait , promettait et 6 ans plus tard personne n’a rien vu venir de tangible. Il faut une revalorisation effective des salaires pour tous les enseignants et pas des mesurettes ridicules qui ne touchent que les début de carrière et pas ceux en poste à la hauteur de ceux des autres pays européens et pour rendre aussi le métier attractif si on veut réellement recruter et faire face à la pénurie actuelle de candidats professeurs.
La réforme du lycée professionnel est un chantier qui coince :
A la rentrée de septembre 2022, le chef de l’Etat avait en effet promis par exemple une augmentation de 50 % de la durée des stages. Où en est-on ?
Sur la santé, il annonce que « notre système de santé sera aussi profondément rebâti ». Il promet que « d'ici la fin de l'année, 600.000 patients atteints de maladie chronique qui n'ont pas de médecin traitant en disposeront. Et d'ici la fin de l'année prochaine, nous devrons avoir désengorgé tous nos services d'urgence ».
... sans préciser de quelles façons il comptait s'y prendre ni ce qu'il voulait vraiment dire par « désengorger ».
Le Ségur de la santé a été un échec. Les problèmes sont toujours aussi profonds tant que la technocratie qui est à la manœuvre en restera au travail de la calculette.
Le nouveau ministre de la santé est complètement hors sujet sur nombre de points. Un seul exemple pour l’illustrer celui de la destruction de la médecine libérale conventionnée. La manière larvée avec laquelle on veut que les médecins prennent plus de patients est en train de casser la qualité de cette médecine de proximité. Les mesures prises sont une fois encore issues là aussi de la vision des technocrates qui ne voient dans les patients que des chiffres. Pour eux, un patient c’est 10 ou 15 minutes...C’est pour cela qu’on n’augmente pas le taux de la consultation de manière significative. L’objectif est d’augmenter le nombre de patients par médecin par une pratique de la médecine à la chaîne. Il n’est d’ailleurs qu’à se référer à la mesure de création d’aides médicaux qui devraient accompagner le généraliste… le seul problème est qu’il faut que le généraliste puisse rémunérer cet aide ce qu’il ne peut pas s’il pratique une médecine adaptée au patient et pas une médecine de vidéo consultation. A l’heure actuelle il n’est tenu aucun compte dans la rémunération de l’acte de la gravité de l’état du patient pour lequel il faut passer plus de temps que pour un autre. L’acte de médecine doit être rémunéré en fonction non pas du nombre de patients qu’on aura pris en charge mais de la diversité en temps dont chaque patient a besoin pour qu’il soit correctement diagnostiqué et soigné ce qui n’est actuellement pas pris en compte. L’acte est rémunéré 25 euros qu’on passe 15 minutes ou le double voire plus pour le soigner…QUE CONCLURE ?
Emmanuel Macron utilise, lui , pour conclure, de « belles » formules qui ne font pas pour moi illusion :
« Chers compatriotes, ensemble, nous avons fait face à l'épidémie, à de nombreuses crises depuis six ans, à tant de périls. A chaque fois, j'ai cherché à libérer les énergies, à protéger les plus faibles, à tenir l'unité du pays avec le seul intérêt de la nation comme guide. C'est le même esprit de responsabilité qui doit nous animer au moment où nous avons à relever sans attendre les défis du changement climatique, du vieillissement, des désordres géopolitiques, des révolutions technologiques comme l'intelligence artificielle ou les algorithmes »
Le chef de l’état a annoncé 100 jours...pour remettre la machine en marche et faire le point le 14 juillet. Il magnifie à la fois son action depuis qu’il est au pouvoir et en conclut par l’esprit de responsabilité dont il a fait, selon lui, preuve pour faire face aux diverses crises. Je pense quant à moi que l’esprit de responsabilité ne peut être partagé que s’il ne nous est pas imposé par des attitudes qui relève d’une forme de despotisme dont il faudrait suivre le chemin.
Le premier mai a été une date de plus pour la contestation d’une réforme injuste… qu’il faut faire retirer.
Le combat continue face au mur d’un absurde entêtement présidentiel qui bloque le fonctionnement du pays et l'avenir du travail qu'il reste à faire.
Pour l'instant c'est la déroute...
« PROMULGATION DE NUIT DE LA LOI RETRAITE !!!LE MEPRIS MACRONIENRÉFORME DES RETRAITES : PREMIER MAI UNITAIRE ET APRÈS ? »
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