• 10 DÉCEMBRE 2018 : INTERVENTION DÉCEVANTE D’EMMANUEL MACRON - 2 sur 2

    J’en viens donc aux annonces que certains journalistes qualifient de « fortes ». Ils feraient bien de se dispenser de prendre parti et de mettre pour ce faire ce type de qualificatif qui ne correspond en rien à la réalité puisqu’à l’évidence elles sont consternantes de faiblesses et de complexité  et ne satisfont pas ni la majorité des Gilets Jaunes ni la majorité des nombreux oubliés. On peut tout juste les qualifier pour certaines, de légères avancées comme la suppression partielle de l’augmentation de la CSG. Quand aux autres ...on regarde dans le détail.

    10 DÉCEMBRE 2018 : INTERVENTION DÉCEVANTE D’EMMANUEL MACRON - 2 sur 2

    (PublicdomainPictures)

    LES ANNONCES DU PRÉSIDENT

    J’en retiens quatre tout au moins pour ce qui est de celles qui sont annoncées comme applicables immédiatement et susceptibles, selon le point de vue du président de calmer la grogne :

    • Le smic augmentera de 100 euros dès janvier 2019, "sans qu'il en coûte un euro de plus pour l'employeur".
      • La hausse de la CSG sera supprimée dès 2019 pour les retraités qui touchent moins de 2 000 euros par mois.
      • une demande "à tous les employeurs qui le peuvent" de verser "une prime de fin d'année à leurs employés", qui sera sans impôt, ni charge.
      • Les heures supplémentaires seront défiscalisées dès 2019

    Il n’a pas dit de quelle manière seraient financées les mesures ni qui les financera et pour quel montant. Il n’a annoncé aucune remise en cause de la suppression de l’ISF. Qui paiera ? Mais ça ce n’est pas difficile à deviner. J’y reviendrai.

    Pour le reste, Emmanuel Macron a l'intention de "rencontrer les maires, région par région" pour faire suite à la demande de ces derniers. La consultation nationale  sera élargie à la représentation politique, au mode de scrutin, à la prise en compte du vote blanc, au rôle des maires, à la décentralisation, à l'organisation de l'État.  Vaste programme mais pourquoi pas.

    En ce qui concerne les réactions des hommes et partis politiques, elles montrent que rien n’a changé chez eux de leurs pratiques politiciennes. Je ne citerai qu’une réaction commune des LR et de l’Ex FN ou de Debout la France concernant le fait que le président avait parlé de la question de l'immigration dans le cadre  de ce qu'il a appelé "revivifier le dialogue démocratique":"Je veux aussi que nous mettions d'accord la Nation avec elle-même sur ce qu'est son identité profonde. Que nous abordions la question de l'immigration."

    Sur ces  propos de l’allocution je reviendrai à un autre moment car elle n’est pas anodine. Mais comme si ce point avait, à l’heure de cette crise, une importance capitale dans la situation actuelle du pays les trois partis concernés ne cessent de citer « l’immigration » qu’ils mettent à tout propos et à toutes les sauces simplistes et indigestes à chaque intervention de l'un de leur représentant sur un plateau télévisé... Tout est dans tout  et j'y reviendrai.
     

    Revenons donc aux annonces point par point.

    GILETS JAUNES:  VA-T-ON DANS LE MUR?

    (Emmanuel Macron aux cérémonies du 11 novembre 2017 à la statue Clemenceau, auteur Remi Jouan - CC BY 4.0-)

    LA HAUSSE DE 100 EUROS DU SMIC

    Cette hausse pourrait être en soi une annonce intéressante si elle avait été plus précise. Le manque de précision fait justement parti de l’annonce et traduit de fait que derrière il n’ y a finalement pas une augmentation du SMIC aussi conséquente. C’est un effet d’annonce qui a d’ailleurs été repris tel quel par nombre de médias mais qui ne résiste pas à une analyse plus poussée.

    Aux salariés concernés de voir s’ils sont satisfaits.
    Pour résumer  dans l’état actuel de la législation ce qui a d’ailleurs été ensuite clairement explicité par Benjamin GRIVAUX , porte parole.

    Les 100 euros se découpent ainsi :

    • 20 euros sont l’effet de la baisse des cotisations ce qui était déjà prévu.
    • 80 euros proviennent de la revalorisation de la prime d'activité. Cette revalorisation était déjà prévue. Elle devait s'échelonner de 2018 à 2021, à raison de 20 euros par an. Le processus est donc accéléré pour augmenter la prime de 80 euros dès 2019.

     

    LE SMIC augmente automatiquement chaque année selon l'inflation. Cette année, la hausse prévue est de 1,8%, soit 36 euros bruts mensuels soit 25 euros nets par mois, ce qui le fera passer 1.184, 93 euros à environ 1.209,93 euros. On pourra y ajouter 20 euros net de baisse de cotisations prévue elle aussi pour tous les salariés. TOTAL : 45 euros net par mois.

    Cette somme tous ceux qui touche le SMIC l’auront.

    Le SMIC n’augmente donc pas de 100 euros mais augmente de ce qui était prévu pour 2019.

    A savoir : A la différence du SMIC, la prime d'activité n'est pas soumise aux cotisations sociales. Son montant ne sera donc pas pris en compte au moment où le salarié partira à la retraite pour calculer le niveau de sa pension.

    Or, pour ce qui concerne les 80 euros nets restants qui sont donc le coup de pouce supplémentaire et qui n’est donc pas une augmentation du SMIC mais bien de la prime d’activité qui pour être touchée doit répondre à un certain nombre de critères.

    Tout comme la baisse de cotisation sociale l’a prime d’activité est payée par l’Etat. On comprend pourquoi Emmanuel Macron a dit « "sans qu'il en coûte un euro de plus pour l'employeur ».

    L’annonce a été simple  dans sa communication pour avoir l’effet choc escompté et les termes bien pesés... mais "en même temps", elle est compliquée à mettre en œuvre.

    LA CASSE À MACRON : SUR FOND DE JEU DE BONNETEAU - 1 SUR ...

    (Vue générale des appareils pour la préparation du gaz - première partie -Louis Figuier - Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu - Public Domain)

    Pour toucher la prime il faut répondre à un certain nombre de critères. Sauf à changer tout le système de perception, c’est l'ensemble des revenus du ménage et la composition de la famille (personnes à charge) qui sont pris en compte pour le versement de la prime. Pas simple à modifier ce qui me fait dire que ça sent quand même l'improvisation...

    Exemple : Un salarié au Smic dont le ou la conjoint(e) gagne mieux sa vie, et qui n'a pas d'enfant à charge, pourrait ne pas en bénéficier ou la hausse être moindre que celle dont a parlé Emmanuel Macron. Pour d'autres, elle pourrait être supérieure.

    Les critères actuels : les plafonds de ressources sont fixés à environ

    - 1 500 euros net pour une personne seule

    - 2 200 euros pour un couple sans enfant où un seul membre travaille ainsi que pour un parent isolé avec un enfant

    - 2 900 euros pour un couple de deux enfants dont les deux membres travaillent. Si le couple dépasse le plafond, il ne pourra pas bénéficier de la prime d'activité.

    J’estime que le seul bénéfice retiré est une accélération de la hausse de la prime d’activité pour donner le tout en 2019 pour celles et ceux au SMIC qui pourront en bénéficier.

    Mais ça n’est pas du salaire, juste une prime qui peut très bien fluctuer en fonction des années et de la situation familiale et qui ne compte pas pour la retraite.

    J’estime qu’Emmanuel Macron va faire peser le coup de pouce sur le budget de l’État voire à terme avec les baisses de cotisations salariales (cotisations chômage et maladie), sur le budget de la Sécurité Sociale et amoindrir les possibilités de celle-ci.

    Rien de simple dans tout cela. 

    Aucune contribution n’est demandée aux entreprises ni aux plus aisés une fois encore...

    On continue d’assister les entreprises alors que c’est elles qui devraient concourir à augmenter les salaires.

    LA COURSE AUX RÉFORMES ou LES DANGERS DE LA MACRONITE... 1sur2

    ANNULATION DE LA HAUSSE DE LA CSG : ON PREND LES RETRAITÉS POUR DES BUSES OU DES PIGEONS ...OU LES DEUX.

    C’est là aussi une mesure qui n’est finalement qu’un effet d’annonce sans autre valeur que de ne plus baisser de 1,7% les pensions des retraités concernés à savoir ceux ayant comme pension jusqu’à 2 000 euros.

    A 2001 euros on continue d’être ponctionné.

    Ce renoncement n’apporte aucune hausse du pouvoir d’achat des dits retraités puisqu’ils reviennent à la case départ à savoir au montant d’une retraite qui avait été dévalorisée depuis 2013 (Merci, Hollande, merci Macron).

    La véritable annonce aurait été de l’annuler pour tous les retraités d’une part dans un esprit de justice et d’autre part de revenir sur l’augmentation à partir du premier janvier 2019 de 0,3% qui en réalité ne compensera pas l’inflation et qui annonce donc une baisse nouvelle du pouvoir d’achat (de l’ordre de 1,4 à 1,7%) qui se cumulera avec celles des années passées. (voir mes propos sur http://quaiducitoyen.eklablog.fr/haro-sur-les-retraites-suite-a154756642 )

    On continue donc de prendre les retraités pour des buses ou des pigeons ou les deux.

     

    QUESTIONS A FRANCOIS HOLLANDE ET MANUEL VALLS

     

    LA DÉFISCALISATION DES HEURES SUPPLÉMENTAIRES

    Cette mesure est une erreur. Si elle donne l’illusion que le pouvoir d’achat va augmenter comme cela a été fait sous Sarkozy, en réalité cela va empêcher de créer des emplois d’une part et d’autre part coûtera cher au budget de l’État puisqu’une fois encore ce seront des rentrées en moins au niveau des taxes.  

    Pour la petite histoire, quand il s'était agit de fustiger la mesure de défiscalisation des heures supplémentaires mises en place par Sarkozy  et supprimée par Hollande ont trouvait parmi les députés à soutenir cette suppression quelques noms de ministres actuels: Christophe Castaner, aujourd'hui ministre de l'Intérieur, Richard Ferrand, le président de l'Assemblée nationale, François de Rugy, le ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, la présidente de la commission du développement durable, Brigitte Bourguignon, la présidente de la commission des affaires sociales...et bien d'autres députés passés depuis dans le camp "d'En Marche!" et le premier d'entre eux, Emmanuel Macron, collaborateur puis ministre de François Hollande...

    Tous des gens de conviction bien sûr!

    10 DÉCEMBRE 2018 : INTERVENTION DÉCEVANTE D’EMMANUEL MACRON - 2 sur 2

    (auteur OliBac, CC BY 2.0)

    La solution n’est pas comme le dit la célèbre formule de Sarkozy de « travailler plus pour gagner plus » mais bien d’augmenter les salaires pour que le salarié puisse en vivre décemment car là est tout le problème de certains des travailleurs de ce pays.

    Les solutions pour financer une hausse substantielle des salaires est ailleurs et ceci sans jeu de bonneteau. J'y reviendrai.

    LA PRIME DE FIN D’ANNÉE

    Défiscalisée pour les salariés et les patrons, c' est également une erreur et c'est injuste.
    Car d’une part une fois encore  prive l’État de recettes et on continue l’assistanat des entreprises et d’autre part toutes les entreprises ne pourront l'attribuer. Ce n'est qu'un coup opportuniste que veulent bien jouer certains patrons pour la fin de l'année et il n'était pas besoin d'un appel du président pour la donner...sauf qu'elle sera sans charge.

    LE FINANCEMENT

    C’est là qu’on perçoit bien le fait qu’Emmanuel Macron n’a absolument pas changé le cap de sa politique. Il persiste et signe en prenant d’autres chemins aussi tordus que son projet initial en faisant croire que tout cela coûtera cher au budget de l’État.
    En réalité il n’en serait  rien si on a une autre conception de ce qu’il faudrait faire à savoir revenir sur les cadeaux faits aux plus riches et en remettant en cause le CICE tel qu'il fonctionne.

    L'ARGENT PUBLIC "MAGIQUE "POUR LES PLUS NANTIS :

    EMMANUEL MACRON PRIVATISE L’ARGENT PUBLIC - 1 sur 3

    La solution est de ne pas accorder un CICE sans contrôle et d’annuler les baisses pérennes de charges qui vont le remplacer pour 2019.  Le CICE  versé en 2019 au titre de 2018 n' a pas à être doublé. 

    Les 20 milliards qui devaient permettre de baisser les charges pourraient donc utilement être utilisées pour financer un certain nombre de vraies mesures pour augmenter le pouvoir d’achat et donc les salaires.
    Il resterait à cibler les aides en direction des entreprises qui s’engagent à créer des emplois si on soutient leur compétitivité.

    RAPPEL : Le coût d’une création d’emploi par le CICE est de l’ordre de 280 000 euros. Une hérésie! Avec cette somme on peut faciliter bien des choses au niveau des petites et moyennes entreprises, une part étant réservé à la modernisation et au développement et une autre à la création d’emplois qui peuvent être pérennisés sur le long terme. Pas besoin d’être économiste pour s’en convaincre.

    MONTANT DE L’ARDOISE

    EMMANUEL MACRON JOUE AU POKER MENTEUR  AVEC L’ARGENT PUBLIC - 1 sur 3

    (ardoise vierge de geralt , C00 domaine public, données des recherches de l'auteur de l'article)

    POUR CONCLURE

    Emmanuel MACRON a raté l’occasion de montrer qu’il était réellement le président du changement en ne modifiant en rien le CAP de sa politique.

    Il persiste dans sa volonté de faire payer par les classes moyennes les frasques de ses calculs budgétaires qui n'ont pas d'effet sur le chômage. Le MEDEF applaudit. Les premiers de cordée se frottent les mains. Une nouvelle année qui s'annonce bien bonne...pour eux.

    Que feront les Gilets Jaunes aujourd'hui? Ils continueront de manifester...

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