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PRESIDENTIELLES 2017 : UNE LOI QUI SAPE L'ÉGALITÉ DU TEMPS DE PAROLE 1 sur 2
Table des scrutins publics de L'ASSEMBLÉE NATIONALE - 14e législature
Oui, vous avez bien lu: 20 présents, 11 pour, 7 contre, 2 abstentions. La majorité devait être de 10.
« La loi est adoptée ».
C’est le résultat du scrutin pour une loi votée ce 24 mars 2016 en deuxième lecture à l’assemblée nationale. Et pas n'importe quelle loi.
A propos, où étaient donc les députés représentants du peuple?
(auteur Benoit-caen Travail personnel Le pupitre de vote des députés à l'Assemblée nationale CC BY-SA 3.0)
Monsieur le président du groupe Parti Socialiste à l’assemblée nationale, Bruno LEROUX, avait déposé ce projet de loi avec d’autres de ses collègues et présenté comme une «modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle». Il avait subi une première lecture lors du dernier trimestre de l’année 2015 puis avait été amendé au sénat.
(On trouvera ce texte ici : http://www.assembleenationale.fr/14/propositions/pion3201.asp)
Tu parles d’un modernisation...une régression serait le terme plus approprié!!!
Je m’en explique.
L’ARTICLE 4 DE LA LOI
Beaucoup de remarques peuvent être faites sur ce texte mais, pour ma part, je m’attacherai au seul article 4 qui contient en lui toute la substance de ce que j’appellerai la manière dont le Parti socialiste, François Hollande et les autres voient la pratique de la démocratie qu’ils vont avec cette loi affaiblir.
« L’article 4 substitue un principe d’équité à l’actuelle règle d’égalité des temps de parole des candidats pendant la période dite « intermédiaire » qui précède l’élection présidentielle, période qui s’étend de la publication de la liste des candidats à la veille de la campagne officielle (laquelle débute le deuxième lundi précédant le premier tour de scrutin, en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 précité). Durant cette période intermédiaire, coexistent aujourd’hui une stricte égalité des temps de parole et une simple équité des temps d’antenne (ces derniers incluant l’ensemble des éléments éditoriaux consacrés à un candidat et à ses soutiens) : cette situation est source de complications, tant pour les chaînes de radio et de télévision que pour les candidats. De surcroît, le nombre important de candidats – 12 en 2007, 10 en 2012 – rend difficile l’application d’une stricte égalité, dissuadant certaines chaînes d’organiser des débats et conduisant in fine à une réduction du temps médiatique consacré à la campagne présidentielle... »
Il faut le lire pour le croire... Un seul mot et beaucoup de différence : on remplace l’égalité du temps de parole par l’équité du temps de parole.
Que veut dire équité ?
Définition de l’équité dans le texte de l’article 4 :
« En conséquence, suivant les préconisations du Conseil constitutionnel, de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l’élection présidentielle, du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) ou encore de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, présidée par M. Lionel Jospin, la présente proposition de loi organique pose le principe d’un traitement médiatique équitable des candidats pendant la période intermédiaire, s’agissant aussi bien du temps de parole que du temps d’antenne.
Il reviendra au CSA de veiller au respect de ce traitement équitable par les médias …audiovisuels, en tenant compte de deux critères, déjà retenus aujourd’hui lorsque s’applique le principe d’équité :
– la représentativité de chaque candidat, appréciée, en particulier, en fonction des résultats obtenus aux plus récentes élections par les candidats ou les formations politiques qui les soutiennent et en fonction des indications d’enquêtes d’opinion ;
(auteur geralt, CC0 domaine public)
la contribution de chaque candidat à l’animation du débat électoral. Celle-ci est aujourd’hui appréciée par le CSA au travers de plusieurs éléments : « organisation de réunions publiques, participation à des débats, utilisation de tout moyen de communication permettant de porter à la connaissance du public les éléments d’un programme politique » (Propositions du Conseil supérieur de l’audiovisuel relatives à l’application du principe de pluralisme politique dans les médias audiovisuels en période électorale, septembre 2015, p. 10). »
Le député PS Jean-Jacques Urvoas, qui est maintenant le garde des sceaux du gouvernement, avait affirmé que cette proposition était destinée à mettre fin "aux règles baroques" qui encadrent le temps de parole des candidats à l'élection présidentielle.
Il a défendu, en décembre 2015, cette thèse qu’on peut qualifier de censure avec des arguments que je juge fallacieux : il indique ainsi que selon lui « le nombre important de candidats – 12 en 2007, 10 en 2012 – rend difficile l’application d’une stricte égalité, dissuadant certaines chaînes d’organiser des débats et conduisant in fine à une réduction du temps médiatique consacré à la campagne présidentielle ».
(Affichage des télévisions et radios anciennes à Amberley Working Museum,auteur Basher Eyre CC BY-SA 2.0
N'aurait-on pas fait des progrès depuis?)
Il fallait donc, à l’inverse, imposer aux dites chaînes l’augmentation de durée nécessaire pour que les débats aient lieu avec un temps suffisant. C’est le rôle et le devoir des médias que de le permettre et de s’organiser y compris en supprimant des émissions de manière temporaire. C'est le devoir de l'Etat de défendre les moyens d'assurer le débat démocratique.
Chacun jugera.
J’y reviens dans l’article suivant sur cette «modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle» selon le Parti socialiste qui avec sa définition de l’ »équité » ressemble plutôt à une régression de la démocratie.
NB : A propos, où sont passés les députés « frondeurs » du PS lors du vote de la loi ? Ils ne se sont pas manifestés ni par leur présence lors du vote ni par des déclarations dans les médias comme ils ont l’habitude de le faire parfois... Pourtant là le sujet est essentiel.
Attendons la réponse...
« ILS SONT DE RETOUR... LES INDIGNES !COMMENT EST VOTÉE UNE LOI PAR 20 DEPUTES A L’ASSEMBLE NATIONALE »