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Non à l'aide aux devoirs après la classe!
Les discussions, consultations, propositions sont en train de se mettre en place entre le ministère de L’Education nationale et les partenaires. C’est bien. Les portes sont ouvertes.
Dans cette perspective, en l’attente de la mise en place de rythmes vraiment adaptés à la réussite des élèves dans le cadre d’une refondation profonde de l’école qui mettra du temps pour aboutir, il est possible de construire un certain nombre de cadres qui pourront évoluer dans l’avenir.
La diminution de la durée de la journée scolaire est un point clé d'une vraie réforme des rythmes.
Et voilà que l’on annonce une proposition de mettre deux heures hebdomadaires de devoirs aidés après la classe!
Si cela se confirmait cela ferait perdre toute crédibilité à cette mesure fondamentale du racourcissement de la journée scolaire.
Je rappelle que les devoirs écrits à la maison sont interdits depuis 1956. S’ils ont persisté en catimini ou non selon les époques, c’était pour l’adulte se rassurer et pas pour des objectifs pédagogiques précis et cohérents. Cela a même fait du tort à nombre d’enfants, personne ne pourra le nier, et notamment ceux qui était déjà en difficulté en classe.
Remettre les devoirs en valeur après l’école, même s’ils sont accompagnés ,c’est casser complétement les objectifs de diminution de la durée de la journée scolaire, fondamentale pour une vraie refondation.
ETRANGE, BIZARRE…INCOHERENT !
DE MON POINT DE VUE, VOILA CE QU’IL FAUDRAIT FAIRE.
Pour les élèves :
Il ne faut pas céder sur les 5 heures maximum de travail scolaire par jour, 4X5 heures et travail une matinée dans la semaine. Au total 23 heures de travail à l’école.
Ce temps doit intégrer tout le travail scolaire. Il ne doit pas y avoir de devoirs écrits à la maison. Il est illusoire de croire que les devoirs à la maison sont bénéfiques pour les élèves. Rien n’empêche par contre de demander à réviser quelques tables ou relire un poème, lire …
C’est à l’école qu’on doit apprendre et que les enfants doivent être aidés. Il ne doit plus y avoir d’aide personnalisée après la classe, la difficulté devant être traitée en classe et tout de suite.
IL FAUT DONC EN FINIR AVEC L’AIDE AUX DEVOIRS APRES LA CLASSE qui pourrait être de deux heures par semaine et être assuré par les enseignants dans le cadre de leur service. Quelle est l’objectif pédagogique de ce temps d’aide aux devoirs ? Cette proposition n’est pas cohérente avec l’objectif premier de diminution du temps de travail journalier pour les élèves puisqu’en réalité les élèves travailleront 25 heures par semaine.
Si cette proposition était conservée, cela montrerait de manière claire qu’au ministère le changement n’est pas à l’ordre du jour. Laisser cette verrue des devoirs est un non-sens qui ne cadre pas avec les objectifs annoncés. A croire que ceux qui proposent cette mesure ne savent pas comment fonctionne concrètement une école : n’y aurait-t-il pas de pause après la classe et avant l’aide aux devoirs ? C’est complétement irréaliste.
Mais peut–être que derrière ces propositions se cache, comme je le disais dans mon dernier article ,« la volonté de ne pas remettre en cause des systèmes déjà en place d’aide aux devoirs, d’accompagnements, d’études surveillées qu’il faudrait remplacer par de véritables activités culturelles et sportives. Celles- ci demanderont en effet des compétences différentes pour prendre en charge non plus des « élèves » mais des enfants qui ont quitté l’école et qui ont aussi droit à des loisirs de qualité. »
Refonder l’école ce n’est pas mettre des cataplasmes pour ne pas déranger les uns ou les autres mais être cohérent dans les actes par rapport aux objectifs qu’on s’est fixé.
Pour les personnels:
Il faut améliorer les conditions de travail et de concertation tout en ayant un certain nombre d’exigences d’organisation négociées.
Il faut en effet mettre des maîtres en surnombre pour une meilleure organisation pédagogique permettant de prendre en charge les difficultés ponctuelles et immédiates des élèves et qui tienne compte du rythme d’apprentissage de chaque élève : la difficulté doit être traitée de suite dès qu’elle apparait.
Cela exige des enseignants de travailler en équipe au quotidien, d’améliorer la prise en charge pédagogique qui n’est plus seulement de type « un maître/ une classe ».
Il faut donc leur donner plus de temps pour mieux se concerter.
L’heure libérée sur le temps de présence des élèves (23 au lieu de 24 heures) peut en être l'occasion et l' un des moyens plutôt que de la consacrer à créneaux d’aides aux devoirs sans justification pédagogique.
L’augmentation à 4 heures hebdomadaires hors présence des élèves (au lieu de 3 heures avant) doit, d’une part et en priorité, permettre une meilleure concertation indispensable au service de l’apprentissage des élèves. D’autre part, elle doit laisser le temps d’assurer les autres tâches comme rencontrer les parents ou assurer les réunions des divers conseils (de cycles, de maîtres ou d’école) et les animations dites pédagogiques (dont il faudrait aussi revoir les objectifs et modalités). L’équilibre de la répartition est à trouver en concertation avec les enseignants.
Il faut aussi, dans ce même cadre, augmenter les moyens humains de prise en charge des élèves en grande difficulté, ceux du RASED (Réseau d’Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté), structure qui a fait ses preuves mais dont on a retiré progressivement et de manière irresponsable les moyens. Aucune proposition n'est à l'ordre du jour.
Les attributions de postes de la prochaine rentrée scolaire doivent être affectées sur ces deux priorités : plus de maîtres que de classe et des RASED renforcés.
Les enseignants ne devraient pas accepter la carotte d’une revalorisation conditionnée à leur participation à l’aide aux devoirs du soir après la classe. Le faire serait entrer dans le jeu d'un nouveau carcan, l'installation de mauvaises habitudes pour les élèves, les parents et les collectivités locales . Il sera difficile de revenir en arrière et cela pourrait être un frein à une vraie refondation de l'école et à une réforme réelle et profonde des rythmes.
La revalorisation de la fonction doit être l’objet de critères plus sérieux que celui de participer à une ineptie pédagogique qui se fera au détriment d'une véritable réduction de la journée scolaire et d'une réforme des rythmes qui est loin d'être achevée...
Patrick PATTE
A suivre…
« Semaine de quatre jours et demi: OUI MAIS... Refondation de l'Ecole : une affaire de détermination et de changement en profondeur. »
Tags : refondation de l ecole, rythmes scolaires, devoirs à la maison, réduction de la journée scolaire