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MUNICIPALES: APRES LE DEUXIEME TOUR
(le suffrage universel, auteur Léonard, Les Temps nouveaux, domaine public)
Nous y voici. Le verdict des urnes est tombé pour chaque commune. Le troisième tour se prépare pour l’assaut aux structures communautaires : communautés de communes et communautés urbaines. Si pour certaines d’entre-elles il n’y aura pas de changements de majorité, par contre à Lille et Dunkerque par exemple les enjeux sont de taille pour le parti socialiste. Il ne faut pas oublier qu’au delà des villes centres, les communautés sont des fers de lance de politiques communes aux collectivités comme l’environnement, l’assainissement, le traitement des déchets. Il y a beaucoup d’investissements dont chaque collectivité veut sa part ce qui n’est guère facile selon qu’on est petite ou grande. Au fil des temps, les communautés ont pris de plus en plus de compétences y compris celles des villes. Encore faut-il que chacune y retrouve son compte et parfois cela est compliqué de s’entendre. Cela le sera d’autant plus après ces municipales où comme à Lille et les villes alentours et Dunkerque, des majorités changent.
Espérons tout simplement que les nouveaux élus sauront se montrer responsables pour le bien de tous les citoyens et passeront au dessus des querelles de clochers voire de personnes dans l'intérêt des populations et de leur vie quotidienne.
LES MEDIAS ET LES FRONTS
On a fait beaucoup de « mousse » prospective sur le Front national et ses gains municipaux. Les médias ont sur médiatisés un phénomène somme toute prévisible comme je le disais dans mon article précédent.
Force est de constater qu’il y a pour certains médias deux poids et deux mesures pour traiter l’information. C’est leur problème mais il convient néanmoins de remettre les chose quelque peu à leur place.
A l’issue du premier tour, des médias télévisés ont discouru sur le gain en nombre de conseillers municipaux du Front national. En ligne de mire, appuyées par des temps d’antennes et de répétitions incessantes, les situations dans les communes d’Henin –Beaumont, Fréjus, Béziers, Forbach ou Perpignan qui ont fait la une des journaux télévisés jusqu’à saturation.Dans la réalité, tout cela était prévisible et écrit. N’oublions pas que déjà aux cantonales de mars 2011, le FN se qualifie dans 400 cantons. Aujourd’hui, les listes du FN sont présentes au deuxième tour dans 315 villes et elles sont arrivées en tête dans 17 villes de plus de 10 000 habitants. Ce sont les faits. Si on regarde les chiffres, rien d’exceptionnel et d’imprévisible donc pour le Front national au niveau du pays puisque celui –ci atteint un score national de 16,50% au premier tour (1,5% de moins au niveau national que par rapport au présidentielle).
Le Front de gauche qui fait des résultats similaires ne semble pas avoir eu la même audience médiatique comme le fait justement remarquer Jean-Luc Mélenchon après le premier tour : plus de 600 listes présentées contre 594 au Front national. Si l’on regarde les listes ayant franchi les 10%, c’est le cas de « 308 des listes autonomes portant la stratégie du Front de Gauche » ont franchi le cap des 10% (316 pour le FN). 2 036 élus pour le Front de Gauche et 473 pour le Front national. Le FN gagne Hénin Beaumont au 1er tour et le Front de Gauche 67 villes. Sur ce nombre, il est vrai qu’il y a 37 villes traditionnellement tenues par les communistes qui ont leur implantation locale ce qui facilite les choses mais n’explique pas tout.
Il eut été donc intéressant que les médias analysent aussi que si le PS perd des points, la gauche non PS – il faut arrêter de classer le front de gauche à l’extrême- se maintient plutôt bien. Je n’entrerai pas dans les détails des composantes du Front de gauche mais il est clair que les résultats sont honorables. L’électeur a fait la différence et s’est déplacé là où il le fallait quand le front de gauche était représenté. Un constat : l’alliance front de gauche ou parti de gauche/EELV face au PS a payé puisque sur 82 villes où cette alliance a eu lieu les scores atteignent en moyenne plus de 15% au premier tour.
LE BILAN DU DEUXIEME TOUR
Je le disais, il est sans appel. Nombre de français ont voté « national » pour des élections locales. C’est un fait. J’exclue les villes qui tombent à droite ou à gauche du fait de problèmes de « personnes », de divisions au sein de mêmes partis. Le parti socialiste perd nombre de villes et, comme disent les commentateurs, de nombreux bastions historiques du fait de sa politique nationale. C’est clair. Le Front national, même s’il a conquis certaines villes (une quinzaine), a reculé dans un certain nombre d’endroits. Des voix ont glissé vers l’UMP ce qui prouve que rien n’est immuable d’un tour à l’autre et que le vote "front national" n’est pas partout un vote de conviction. Quant à l’UMP, même s’il crie victoire et conquière sur le terrain nombre de villes et annonce « une vague bleue », il n’est pas sûr que cela lui sera profitable lors des prochaines échéances européennes. Cela permet à Jean-François Copé d’être « tranquille « au sein de sa famille politique et de faire croire que son parti n’est plus divisé durant quelques semaines. Gageons qu’après le mois de mai, les « couteaux » ressortiront pour la lutte des « chefs » en vue des présidentielles de 2017. Mais cela c’est une autre histoire qui s’annonce...
En tout cas c’est un vote de sanction pour le gouvernement, sa politique et le chef de l’Etat. Ce n’est pas tant la condamnation du pacte de responsabilité « fantôme » qui a été, à mon sens en ligne de mire mais aussi tout un ensemble de mesures qui ont paru injustes tant au niveau de l’imposition qu’au niveau des maladresses faites pour les expliquer ou les appliquer. Le sentiment d’une certaine injustice sociale et que c’est le MEDEF qui dirige le pays avec François Hollande ont concouru à l’abstentionnisme des électeurs de gauche.
Le président de la république doit donc en tirer les conclusions pour changer de politique.
Je ne sais pas ce que fera François Hollande aujourd’hui ou dans les jours qui viennent pour prendre en compte l’avertissement sans frais des électeurs face à une politique qu’ils désapprouvent majoritairement. Je n’entre pas dans le débat du remaniement ou du changement de premier ministre qui n’est en aucun cas l’essentiel si ce n’est pas pour provoquer une marque physique au changement de politique. Depuis ce matin, nous sommes déjà abreuvés par nombre de médias de supputations, pronostics, verbiages divers et variées. On surveille les entrées de l'Elysée, de Matignon, les déjeuners. Les noms circulent...
Nouveau premier ministre ou pas, si François Hollande ne revient pas sur les conséquences du pacte de responsabilité à savoir trouver 50 milliards dont on ne sait pas comment ils seront distribués et avec quel effet et sur quels postes du budget national cela sera pris, la confiance ne reviendra pas. Si des mesures fortes et concrètes ne sont pas annoncées et bien expliquées pour montrer que l’on change de cap pour plus de justice sociale, plus de contrôles et de ciblages des mesures prises pour relancer l’emploi, alors la colère risque de s’amplifier et le printemps risque d’être chaud sur la place publique.
(La prise de la Bastille durant les manifestations de l'automne 2010 contre la réforme des retraites. Auteur: Geoffroy, licence Creative Commons paternité – partage à l’identique 3.0 (non transposée))
Une autre direction est pourtant possible en cohérence avec notre situation économique et celle de l’emploi tout en conservant nous acquis sociaux qui nous permettent de mieux lutter qu’ailleurs en Europe du point de vue de la solidarité nationale face à la crise. Tout cela doit être lié bien sûr à l’annonce de prises de positions de choc en direction de l’Europe sans laquelle nous ne sortirons pas des problèmes qui nous minent.
Il est clair que le 15 avril, nous aurons aussi des réponses sur les intentions véritables de François Hollande puisque la France aura à présenter à l’Europe ses mesures d’économie en fonction des critères européens.
Si François Hollande persiste à poursuivre sa politique même s’il essaie de mieux l’expliquer, il me semble qu’il doit craindre la réaction, cette fois, de certaines des composantes de sa majorité qui pourraient très bien ne plus le suivre sur la voie qu’il a prise depuis presque deux ans. Il y a depuis plusieurs semaines des voix qui se font entendre sur le sujet. La majorité à l’assemblée nationale pourrait s’affaiblir du fait de nombre de députés qui pourraient ne plus suivre...
L’implosion ne guette-t-elle donc pas le PS lui même ? On le saura sans doute bientôt après la prochaine « claque » qui sera à n’en pas douter celle des élections aux européennes si François Hollande ne convainc pas qu’il change de politique.Puisqu'on parle de changement, le parti socialiste aurait à gagner à changer d'exécutif. Le secrétaire national, Harlem DESIR, qui n' a pas contesté la direction de la politique prise par le président de la République, devrait démissionner pour que son parti puisse prendre les dispositions nécessaires pour rapidement changer l' exécutif pour que celui-ci soit à même d'apporter des propositions de gauche susceptible de relancer la confiance donnée en 2012 par les électeurs.
Le parti majoritaire risque de continuer d’être celui des abstentionnistes suivi de près par le Front national (un comble pour un parti qui veut sortir de l’Europe mais présentera des listes...ce qui est complètement incohérent). Espérons que les listes de celles et ceux qui veulent changer l’Europe pour qu’elle soit au service des peuples aient de bons scores pour que nous n’ayons pas honte de notre pays qui de toute façon est lié pour son avenir à l’Europe mais pas n’importe quelle Europe dans laquelle nous devons faire entendre notre voix y compris en prenant des positions fermes face au technocratisme de Bruxelles.
En tout cas, il est dommage que les électeurs aient dû lancer un avertissement de cette ampleur pour que peut-être , au gouvernement la politique change... Depuis deux ans, les signes étaient nombreux de l'incompréhension par le peuple de la politique menée.
Il faudrait arrêter au niveau du sommet de l'Etat d'être dans une "bulle" dans laquelle on ne perçoit plus la France qu'à travers le prisme des médias ou de conseillers qui ne sont pas sur le terrain...
A suivre...(Bubbles par George Hodan, Site Web, Public Domain CC0)
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