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LES GRIGNOTAGES DE LA LOI 1905 ET LA LAÏCITÉ -1/6 -
La loi de 1905 qu’on rattache à la déclaration de l’homme et du citoyen dans le préambule de notre constitution est d’abord la loi de la séparation de « l’église et de l’état » « La République assure la liberté de conscience.... »,c'est-à-dire le droit de croire ou de ne pas croire. La séparation de l'Etat des religions, c'est l'affirmation que l'intérêt général constitue un bien de tous quelles que soient les différences. C’est donc un état d’égalité qui est affirmé par une laïcité qui permet le « mélange » de tous avec chacun et ses différences.
Il ne s’agit pas nier les différences mais de faire que l’égalité des droits de l’individu soit au-dessus des différences pour les protéger contre « l’hégémonie de l’une sur les autres. »
C’est tout le contraire de la « séparation » que d’aucuns veulent promouvoir et qui n’est que repli identitaire en exacerbant les différences.
L’EXACERBATION DES DIFFÉRENCES... ATTENTE A LA LAICITÉ
Les religions n’ont pas à être placées au cœur de la laïcité. De par la loi de 1905 et la laïcité, elles doivent être mises à leur place comme tout le reste à savoir dans l’espace civil ce qui assure à chacun sa liberté de conscience et d’expression.
L’égalité devant la loi et la liberté de conscience sont les deux piliers de la laïcité ce qui procure des droits et des obligations. Elle doit servir à réunir les hommes dans un même idéal celui de vivre au sein de la république en bonne intelligence, dans la paix, la fraternité, la liberté et l'égalité. Il suffit de regarder autour de nous pour constater que cet idéal est encore loin d'être atteint mais l'important est de s'employer à tendre vers l'objectif d'où la nécessité de faire respecter les principes de la république. C'est peut-être là que le bât blesse et ce n'est pas d'aujourd'hui...
Pour ma part, j’estime qu’actuellement, et cela monte en puissance depuis au moins une vingtaine d’années, le religieux s’extériorise de plus en plus dans nos espaces communs. On parle de plus en plus de communautés catholiques, juives, musulmanes comme si on voulait accentuer les différences de chacun qui existent certes et qu’on ne doit pas nier mais qu’en quelque sorte on exacerbe. On est en droit de se demander pourquoi et si ce n’est pas pour placer nos différences au dessus de ce qui devrait être l’essentiel : nos ressemblances.
Des différences on peut bien entendu débattre mais de là à vouloir en faire des étendards pour les imposer aux autres... ce n ‘est pas la laïcité.
Je me souviens que dans un de mes articles « Humeurs » septembre 2012, je réagissais instinctivement suite à une certaine saturation créée par les politiques et les médias à propos du religieux:
« On a envie de dire : ça va, stop, on a compris ! Il y en a marre d’ouïr en continu les états d’âme des religions, religieux, politiques - tous respectables soient-ils. " Ras le bol » j’ai aussi de l ‘utilisation qu’on en fait à la une de l’actualité. Ça ne fait que renforcer le jeu des extrémistes de tout poil en leur faisant de la publicité.
Quand est-ce que les religions retournent dans le domaine privé ?
C’est d’ailleurs ce que souhaitent sans doute la grande majorité de celles et ceux qui les pratiquent : vivre leur foi dans la sérénité. Et pour les autres, les non croyants, un peu de silence dans l’arène médiatique ne serait pas de trop. »
Ceci dit même si j’ai pu être un excessif, cela résume le ressenti que j’ai du forcing qui est fait par certains pour exhiber une identité religieuse. Quel en est le but ou l’intérêt?
(stop, domaine public)
J’ai le sentiment que l’on veut de plus en plus imposer le religieux dans l’espace public. Ce n’est pas à mon avis la bonne manière pour que règne une certaine paix républicaine d’autant que l’on sait que les religions séparent plus qu’elles n’unissent compte tenu de leurs divergences notamment dogmatiques. Alors où est le sens de cette frénésie de vouloir mettre en avant ses dogmes, ses coutumes en sachant qu’on s’oppose aux dogmes et aux coutumes des autres et que ça ne rassemble pas ? Depuis une bonne vingtaine d’années, les signes extérieurs d’appartenance religieuse sont de plus en plus apparents et en nombre dans l’espace public ce qui n’était pas le cas avant et comme si chaque religion voulait marquer un territoire pour on ne sait quel objectif si ce n’est paraître.
Un exemple récent mais on pourrait en citer bien d'autres: les déclarations maladroites ou malheureuses- mais néanmoins maintenues à ce que j'ai pu discerner - du président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) qui déclare sur Europe 1, avant l'organisation d'un dîner "moment républicain" censés réunir diverses composants de la société , que «toutes les violences [antisémites] aujourd’hui […] sont commises par des jeunes musulmans», et non par des sympathisants frontistes. Le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Dalil Boubakeur, a fait savoir qu’il ne viendrait pas au dîner du CRIF ainsi que Mohammed Moussaoui, le responsable de l’Union des mosquées de France (UMF). Un bien mauvais exemple de comportement peu responsable donné aux "fidèles et croyants" respectifs alors que le dialogue et l'action commune contre le communautarisme devraient être de mise en cette période de tension... Et si au lieu de déclarations dans les médias et dans la presse chacun se mettait autour de la table pour voir de quelle manière les juifs et les musulmans pourraient s'associer pour travailler sur ce qui les réunit pour faire vivre la laïcité? J'apprends ce jour que le président de la république doit prendre l'initiative de les réunir cet après-midi pour "calmer le jeu"... Un comble! On se croirait au niveau d'élèves de maternelle qui se chamaillent dans une cour de récréation. OU EST PASSÉ CHARLIE ?
En disant cela, certains, me taxeront peut-être d’anti religieux. Ils auront tort, je suis simplement un citoyen qui utilise sa « raison critique », celle essentielle qui doit être affutée et exercée pour pouvoir être capable de considérer le tout et le détail avec un esprit de tolérance.
Il ne faut pas avoir peur de heurter quiconque car c’est la vérité. Il faut dire avec sincérité ce que l’on pense en usant justement de cette liberté d’expression que nous confèrent la laïcité et notre droit républicain.
LE PROBLEME EST QUE TOUT LE MONDE NE JOUE PAS LE JEU DE LA LAICITÉ
( Domaine Public, Loi de séparation des Églises et de l'État. Page 1 - Archives Nationales - AE-II-2991.jpg)
A regarder l’histoire et ce qui se passe en droite ligne d’elle dans notre présent, chacun peut percevoir que des menaces de plus en plus graves pèsent sur la loi de 1905 et la laïcité.
Il est facile de faire des discours sur la laïcité et le respect de la loi de 1905 comme beaucoup le font. Tout le monde est pour !
A l’épreuve des faits, ces discours se fissurent souvent, à preuve les entorses faites il n’y a pas si longtemps de la part de socialistes, UMP ou frontistes ou quand on entend les positions des uns ou des autres souvent divisés à propos du débat sur les crèches, symboles religieux dans les bâtiments publics de la république ou du concordat en Alsace-Moselle, la loi Carle, la charte de la laïcité, l’enseignement du fait religieux à l’école, le voile à l’école, l’abattage pour la viande casher et halal...
Oui à la laïcité, telle est la clameur... mais souvent à condition de ne pas l’appliquer pour trouver des accommodements en fonction des circonstances et des forces religieuses en présence qu’on ne veut pas « froisser »... électoralisme oblige...
Il y a en effet beaucoup à dire sur les tentatives et manœuvres pour « dénaturer » la laïcité.
Certains utilisent ce terme improprement pour faire passer leurs idées contre les croyants et appellent ainsi à une certaine discrimination.
D’autres veulent transformer son essence en outil pour mettre les religions sur le devant des préoccupations et favoriser le prosélytisme religieux et le communautarisme.
La République n’est pas athée, bouddhiste, chrétienne, juive, musulmane,...elle est laïque ! La laïcité se définit comme la garantie de la liberté de toutes les convictions philosophiques et religieuses, à n'en faire prévaloir aucune sur les autres, qui peuvent ainsi coexister si possible harmonieusement.
« La laïcité c’est un cadre juridique et politique permettant à des êtres différents du point de vue des options spirituelles ou des convictions personnelles de vivre ensemble... » (Henri Pena-Ruiz) à égalité de droits (et de devoirs) et avec le respect d’une liberté de conscience qui reconnaît à chacun le droit de croire ou non . La puissance publique devant nous unir, elle ne peut le faire que si elle promeut ce qui est commun à tous.
Défendre strictement l’application de la loi de 1905 est la seule ligne à conserver pour défendre la laïcité de notre pays qui doit être le moteur actif de notre devise républicaine « liberté, égalité, fraternité » que malheureusement les dérives politiciennes ont contribué à mettre à mal d’où les situations actuelles de tensions entre certains de nos concitoyens.
Et il y en a donc pour tout le monde à droite comme à « gauche » dans la participation, depuis des décennies, au grignotage de la loi de 1905, « acte souverain de la République » et par là même a affaibli la laïcité.
Cet affaiblissement a son retentissement de nos jours et les compromissions continuent...comme on le verra plus tard.
Désolé, mais c’est ainsi que je perçois les choses.
Le citoyen que je suis a, de plus, ce goût amer de la trahison politicienne qui se poursuit et qui veut faire croire que parce qu’il y a une religion de plus en France, la religion musulmane - classée deuxième-, il faut de ce fait aménager la loi de 1905 et la laïcité.
C’est un faux prétexte et un non sens qui n’est avancé que pour accorder une fois encore des facilités à la poussée du religieux dans le domaine public pour diverses raisons soit parce qu’on ne sait plus quoi faire soit par pur électoralisme comme cela a été de tout temps.
La religion musulmane comme les autres religions, doit entrer dans le cadre de la loi de 1905, ni plus ni moins.
Nos politiques qu’ils soient ou non au pouvoir feraient bien de s’en rappeler pour l’avenir. J’y reviendrai.
LA LAICITÉ A ÉTÉ MALMENÉE PAR LA CLASSE POLITIQUE
Au fil du temps les gouvernants et les législateurs ont grignoté la loi de 1905, pilier de la laïcité, en faveur de l’influence catholique et juive et avec une quasi exclusivité. On peut le prouver aisément par les faits.
Il ne suffit pas de brandir des grands principes comme je l’entends faire par certains, pour s’exonérer de leurs responsabilités. Encore faut-il ne pas avoir été complice de la désagrégation de la laïcité par des lois et des circulaires qu’ils ont soutenues depuis des dizaines d’années, eux ou leur parti au pouvoir. Des politiciens de tout bord ont cédé sous toutes les législatures soit à l’électoralisme soit ont mêlé leurs convictions religieuses personnelles au droit public et ont donc abandonné certaines bases de la loi de 1905 pour de nombreuses compromissions avec les instances religieuses notamment catholiques.
Les partis qui ont été au pouvoir ont donc leur responsabilité de l’affaiblissement de la laïcité avec les gouvernements qu’ils ont mis en place et qui se sont succédés jusqu’à nos jours à droite comme à gauche.
Il suffit de se pencher dans la jungle des textes législatifs et circulaires régissant notamment l'Education pour s'en convaincre mais pas que...
C’est très facile. Il suffit de faire un point d’histoire depuis 1905.
Ce sera pour le prochain épisode...
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