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L'URGENCE CLIMATIQUE ET LE POLITIQUEMENT CORRECT
Lors de mon dernier article je faisais état des propos d'Emmanuel MACRON quant à l'attitude qu'avaient eu Greta Thunberg et 15 jeunes qui avaient déposé une plainte devant le Comité des Droits de l'Enfant de l'ONU .Il regrettait «des positions très radicales, de nature à antagoniser nos sociétés ».
Bref, rester politiquement correct* …et ne pas faire de vagues telle devrait donc être l'attitude des jeunes.
Je posais la question de savoir si cela voudrait dire que les jeunes ne doivent pas s'exprimer et se rebeller face à l’avenir qui les attend pour ne pas "heurter" les autres citoyens?. Il faudrait donc laisser faire les dirigeants au pouvoir et ne pas déranger les consciences de ceux qui « s’en foutent » sous prétexte que cela créera des antagonismes. C’est justement ainsi, en créant des chocs pour faire bouger et réfléchir mais aussi en explicitant de manière claire et argumentée ce qui ne va pas que l’on avancera.
En matière de climat, ce n'est plus l'heure du politiquement correct... et du "en même temps".
(image Thomas Bresson - Own work CC BY 4.0)
LE POLITIQUEMENT CORRECT
Peut-on rester politiquement correct face à l’urgence climatique et ainsi ne pas alerter avec force sur les risques d'effondrement de nos civilisations ? Car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Quand Jean –Michel Blanquer, ministre de l’Education (encore) nationale affirme redouter une "génération de déprimés", on se rend compte du niveau de prise de conscience d’un ministre qui a en charge l’Education nationale qu'il malmène par ailleurs avec les élèves, les parents et les enseignants par des soi-disant réformes non concertées et imposées au pas de charge tout en pratiquant le langage "politiquement correct" autrement nommé "langue de bois". C’est Jean-Michel Blanquer qui est déprimant…
Il est craint par les politiciens que ce soit en France ou ailleurs, une révolte de la Jeunesse face à l’impuissance ou à la non volonté éventuelle des dirigeants du monde de prendre le problème en charge. Et ce ne sont pas les jeunes qui sont à l’origine des antagonismes mais bien les politiciens qui n’ont pas le courage nécessaire pour secouer le cocotier.
Les propos du président Macron semblent sous-entendre que tout se passe au mieux actuellement dans nos sociétés alors que les antagonismes sont là depuis longtemps, latents, bien avant Greta Thunberg … Ce sont les gouvernants actuels et passés qui les ont créés, incapables de prévoir à long terme, malgré les avertissements des scientifiques **, le devenir de la planète et les moyens de la conserver dans un état qui permette aux générations futures de vivre en sécurité. Greta Thunberg et ceux qui se joignent à elles sont là pour justement que se réveillent les consciences et que les gouvernants actuels prennent des mesures chocs avant qu’il ne soit trop tard. Le problème est qu’il y a une incapacité des gouvernants de la planète, en commençant par l'Europe, de s’allier intellectuellement pour mettre en place un plan d’action cohérent qui tienne la route.
On n'est donc pas sorti de l'auberge ce qui nécessite de faire bouger les lignes avec force et pour cela développer un vaste mouvement d'exigences de la part de celles et ceux qui sont concernés c'est à dire les Jeunes mais aussi tous les autres pour peu qu'on soit un minimum conscient des responsabilités qu'on doit avoir vis à vis des générations futures.
Quand Brune Poirson dit qu’ « Il est important d’avoir des personnes qui éveillent les consciences. Mais quelles sont les solutions qu’elle met sur la table? » cela montre déjà bien que la secrétaire d’Etat est dépassée. Ce n’est pas à Greta Thunberg de trouver des solutions mais à son gouvernement de le faire.
(MHM55 - Own work CC BY-SA 4.0)
De la même manière, alors que plus de 20.000 personnes ont marché dans les rues de Paris pour le climat, Emmanuel Macron estime que « défiler pour dire que la planète brûle, c’est sympathique, mais ce n’est pas le problème ». Le président a proposé « qu’ils aillent manifester en Pologne », un pays « qui bloque » les efforts de l’Union européenne en faveur de l’environnement. Le président de la République leur a même proposé de faire des "opérations de ramassage"... C'est dire la considération qu'il a de la colère des jeunes et de la limite qu'il met à leurs interventions.
En France, donc tout va bien...et des manifestations il se moque , trouvant cela sympathique mais…inutile. Un peu de mépris de plus...pour dire de laisser faire les adultes gouvernants... Pas de vagues: cela pourrait gêner la mise en oeuvre de sa politique irresponsable tant sur le plan économique que social. On en voit le non résultat navrant dans nombre de domaines. J'en ai déjà donné des exemples sur ce blog. Je n'y reviens pas...pour l'instant.
Question : est-ce que Emmanuel Macron croit que c’est en exprimant sa fâcherie vis-à-vis de Greta Thunberg, en se moquant des manifestations sur le climat qu’il apporte des solutions aux problèmes et aide à la prise de conscience?
LES SOLUTIONS EXISTENT
Il faut donc continuer de mener la bataille et l’amplifier et démultiplier par tous les moyens nécessaires la prise de conscience des populations pour que nos politiques prennent les vraies mesures qu’ils n’ont pas encore su prendre, Emmanuel Macron en tête qui n’a pas daigné, lors des dernières présidentielles, présenter un programme digne de l’urgence environnementale et sociale sur le long terme. S'il ne savait pas il aurait dû s'informer... la moindre des choses quand on brigue la présidence de la République.
Il ne peut pas dire aujourd’hui qu’il ne sait pas. Comme l'exprimait Greta Thunberg devant l'ONU : «… vous avez le devoir d’écouter les scientifiques, et c’est tout ce que nous vous demandons : unissez-vous derrière les scientifiques. »
Et ce n’est pas en restant donc politiquement correct qu’on fera avancer les choses en Europe mais bien en arrêtant ce laxisme qui permet que chaque état fasse ce qu’il veut.
( auteur Jeanne Menjoulet Attribution-NoDerivs 2.0 Generic (CC BY-ND 2.0)
Il n’est pas demandé aux gouvernants d’agiter les bras et de discourir, de faire de la communication ou de dénigrer les lanceurs d’alerte mais tout au contraire de développer les prises de conscience des populations. Car jusque là que font les gouvernements notamment le gouvernement français ? Les mesurettes contradictoires surtout à base de taxes qu’on fait ou qu'on défait , les plans d’aides aux économies d’énergie qu’on calcule pour que ça ne coûte pas trop au budget de l'état et qu’on supprime ou diminue, les aides pour acheter des véhicules électriques (qui se sont pas plus écologiques que ça et auxquels n’ont accès que ceux qui peuvent les acheter) ne montrent pas l’ampleur des dégâts que pourront à terme faire les dérèglements climatiques mais donnent l’impression d'un plan d'action improvisé à la va vite, sans grande cohérence …et surtout illisible par la population ce qui n'aide pas à une mobilisation citoyenne sur le sujet sauf à être contre les taxes ou trouver telle ou telle aide injuste pour l'un ou l'autre. Antagonismes vous disiez...
Je l'exprimai dans mon dernier article sur le sujet : « Les gouvernants français devraient en être convaincus (de l'urgence climatique) pour entraîner les autres en Europe et dans le monde voire faire pression si nécessaire. Et c'est nécessaire. Il va de soi qu’il faut dire que ce n’est pas si simple dans un monde où règne toujours l’idée de croissance infinie égoïste comme celle prônée par Trump pour les USA. Mais il n‘est pas le seul. D’où la nécessité de ne pas se contenter de paroles sur le plan européen. Pour cela il y a des moyens d’actions si la volonté politique y est au-delà du verbe. A quoi sert l’Europe si elle ne peut aider à préserver l’avenir avec les autres parties du Monde ? »
Un Big Bang des règles communautaires européennes est nécessaire pour lutter contre l'inertie des dirigeants des pays qui n'ont d'autres préoccupations que leur politique intérieure électoraliste pour conserver le pouvoir ! Les exemples de la Pologne, de la Hongrie ou même de la Roumanie sont significatifs de l'état de la situation alors même que les dits pays profitent de la manne financière de l'Union Européenne dont ils bafouent nombre de principes de base dont celui de l'état de droit. L’ère du politiquement correct est donc bien dépassé. Au parlement européen et à la commission d'agir ne serait-ce qu'en faisant appliquer sans détour et faiblesse les règles existantes ce qui n'est pas fait.
Il ne faut pas faire de catastrophisme mais bien populariser la vérité et s’appuyer sur le militantisme comme celui de Greta Thunberg et d'autres et proposer les moyens sérieux d’y faire face. Cela passe en France et ailleurs par un plan à long terme pour une transition énergétique bien pensée à court et moyen terme pour sortir, tout en ne fragilisant pas toujours les mêmes citoyens, des carcans économico- industriels actuels ce qui permettrait d’avancer étape par étape vers un avenir mieux préservé sur le plan environnemental. 2030, 2050 c'est demain matin.
Que chacune et chacun des citoyens regarde son calendrier et l'âge de ses enfants et petits enfants ou ceux des autres. Elle ou il aura vite compris l'alerte.
Le monde a deux ans pour agir contre le changement climatique a déclaré Antonio Guterres, le secrétaire général de l'ONU : "Si nous ne changeons pas d'orientation d'ici 2020, nous risquons (...) des conséquences désastreuses pour les humains et les systèmes naturels qui nous soutiennent". En disant cela il s'appuie sur les rapports des scientifiques.
C’était en septembre 2018… Ne soyons pas dupes. Il est donc impossible d'attendre les prochaines présidentielles pour voter pour de nouveaux programmes... L'action c'est maintenant.
A Emmanuel Macron de jouer, comme Président de la France. En a-t-il la capacité et la volonté au delà de ses ambitions électoralistes ?
L’avenir le dira.
(Image par pixabay Tumisu)
*Politiquement correct : une "façon de parler, d'agir ou de penser très consensuelle". La spécialité de certains politicien adeptes de la langue de bois ou de la théorie du "mais en même temps".
**Avertissement des scientifiques : (source le Télégramme du 23 novembre 2015). Les premiers messages d'alerte datent de 1970. En 1971, à Stockholm, 30 scientifiques de haut niveau provenant de 14 pays ont exprimé un risque de « changement global climatique rapide et grave causé par les humains ». Un télégramme diplomatique expédié à Washington par le représentant américain aux Nations Unies à Genève, le 11 mai 1978 tire la sonnette d'alarme sur les menaces qui présenteront « à nos enfants un monde beaucoup plus dangereux et risqué »." Parmi celles évoquées (surpopulation, raréfaction des ressources naturelles, nucléaire, fossé riches/pauvres...), l'une pointe le changement climatique. Les effets et les causes sont clairement désignés : « Une tendance au réchauffement » - dont les conséquences pourraient être « un désastre pour la production alimentaire », et un risque accru d'« événements météorologiques extrêmes » - qui pourrait être due à une augmentation du dioxyde de carbone (CO2) provoquée par la combustion des carburants » (production d'énergie, transports, industries). Le terme « effet de serre » est utilisé...En 1979, la première conférence mondiale sur le climat, à Genève, informe les 138 États membres de l'Organisation météorologique mondiale (OMM : 185 États membres aujourd'hui) de l'urgence du problème climatique.
Depuis plus de 30 ans le GIEC ( Groupe intergouvernemental d'Etudes sur le Climat) alerte, bases scientifiques à l'appui, sur l'impact de l'activité humaine sur l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Le rapport 2014 est édifiant. Celui de la branche française de 2019 montre qu'il n'aurait pas fallu attendre 30 ans pour agir.
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