• HUMEURS DE MARS 2019 ( 2 ) - LE SÉNAT, L'EXÉCUTIF ET L'AFFAIRE BENALLA...

    Dans mon précédent « billet d’humeur » j’ai dit que je traiterai d’au moins deux ou trois actualités choquantes qui font qu’on peut se poser des questions quant à la capacité du pouvoir actuel de gouverner avec toute la sérénité qu’il faudrait pour que des décisions sages soient prises pour le pays...

    Quand un président se permet donner une leçon de sagesse à une septuagénaire bousculée par les forces de l’ordre lors d’une manifestation lui faisant comprendre qu’il n’est plus de son âge de manifester... Ça me choque.

    HUMEURS DE MARS 2019 ( 2 ) - LE SÉNAT, L'ÉXÉCUTIF ET L'AFFAIRE BENALLA...

    On peut lui retourner la leçon quant à la sagesse avec laquelle il ne maîtrise pas la situation actuelle de la France... et le manque de sagesse évident quand il s’est agi, au début de son quinquennat de choisir nombre de ses collaborateurs...

    Je veux, en effet, au moins aborder les suites de l’affaire Benalla et les manifestations des Gilets Jaunes des 20 samedis. 

    LES SUITES DE L’AFFAIRE BENALLA

    Je ne vais donc pas retracer toute cette affaire. Le contenu me semble  tortueux, fait de nombreuses parts d'ombres qui ne m'intéressent pas.  Les médias n’ont cessé de narrer cette histoire depuis huit mois au moins. Laissons à la justice le soin d'éclaircir tout cela. A elle de jouer son rôle.

    Je peux néanmoins constater qu’un individu au plus proche du président de la république a eu pour le moins des comportements peu explicables sur la voie publique pour ce que j’en ai vu, laissant l’impression que c’était plus un baroudeur prêt à la bagarre qu’un collaborateur de cabinet : frapper des manifestants le 1er mai comme on a pu le voir est pour le moins choquant.

    HUMEURS DE MARS 2019 ( 2 ) - LE SÉNAT, L'ÉXÉCUTIF ET L'AFFAIRE BENALLA...

    (auteur QuinceMedia, CC0 domaine public)

    En résumé, après avoir entendu dans le cadre d’une enquête parlementaire du sénat les différents protagonistes de ce qu’on a appelé « l’affaire Benalla », le bureau du sénat vient de saisir la justice non seulement du cas de l'ancien collaborateur de l'Élysée, mais aussi de ceux de hauts responsables de la présidence comme Vincent Crase et de Patrick Strzoda, directeur de cabinet d'Emmanuel Macron. Les dossiers sont transmis pour suspicion de faux témoignage devant la commission d'enquête sénatoriale (un délit passible de cinq ans de prison et 75.000 euros d'amende ce qui n’est pas rien)

    Le bureau du Sénat a également décidé de transmettre au parquet les déclarations sous serment d'autres collaborateurs d'Emmanuel Macron : le secrétaire général de l'Élysée Alexis Kohler, et le général Lionel Lavergne, chef du groupe de sécurité de la présidence. Le motif : des "incohérences" et "contradictions" relevées par la commission d'enquête qui a rendu le 20 février un rapport d'enquête.

    Il est laissé « au Parquet »le soin de voir quelles suites donner. 

    L’exécutif conteste au bureau du sénat le droit d’agir ainsi  et le montre publiquement :

    • Le premier ministre ne vient pas à la séance du sénat pour les questions au gouvernement.
    • Le président de l’assemblée nationale annule un déplacement avec le président du sénat.
    • Des membres de la majorité parlementaire et des ministres ont réagi pour condamner la démarche du sénat

    Réagir comme il l’a fait, face à la décision du bureau du sénat de mettre, après enquête de la commission sénatoriale, devant la justice les protagonistes de l’affaire Benalla, montre à l’évidence que l’exécutif n’accepte donc pas le contrôle du parlement dont c’est un des rôles majeurs.

    C'est cela qui est choquant et me donne un élément de plus pour dire que nous sommes gouvernés par des individus qui n'acceptent pas la critique.

    Ici, il s’agit du sénat mais cela aurait pu être l’assemblée nationale dont la commission des lois avait aussi ouvert une enquête. Après quatre jours d’audition, la dite commission avait abandonné, à la suite d’un désaccord entre la majorité et opposition sur la liste des personnes à entendre... En bref, la chambre des députés a été dans l’incapacité de mener une commission d’enquête pour contrôler des agissements pas très clair d’un membre salarié du pouvoir exécutif. Pas terrible pour la démocratie et la séparation des pouvoirs.

    HUMEURS DE MARS 2019 ( 2 ) - LE SÉNAT, L'ÉXÉCUTIF ET L'AFFAIRE BENALLA...

    (Amphithéâtre du Sénat - Jackintosh — Travail personnel - CC BY-SA 3.0)

    J’en conclus qu’il est bien que le sénat ait donc joué son rôle à plein ce qui est une bonne nouvelle, montrant par là qu’il y a encore un peu de contre pouvoir dans cette République qu’il faudra quand même rénover un jour.

    De toute cette affaire, je retiens que, de par ses réactions, l’exécutif et notamment le chef du gouvernement remet en cause la liberté du parlement, et ici en l’occurrence du sénat, de contrôler le dit exécutif.

    Si le président de la république de par sa fonction ne peut être responsable devant le parlement, il s’est néanmoins lui-même écarté de cette ligne en se mettant dans la position de quelqu’un qui endosse une responsabilité qu’on ne lui demande pas. C’est encore une attitude choquante que je relève : Je me rappelle les propos du président en juillet 2018, à la Maison de l’Amérique latine de Paris, se disant prêt au combat dans l’affaire Benalla : « La République exemplaire n’empêche pas les erreurs. S’ils cherchent un responsable, le seul responsable, c’est moi et moi seul. C’est moi qui ai fait confiance à Alexandre Benalla. Celui qui a été au courant et a validé l'ordre, la sanction de mes subordonnées, c'est moi et personne d'autre ». « S’ils veulent un responsable, il est devant vous, qu’ils viennent le chercher » ceci après deux jours d'audition de ses collaborateurs à l'Assemblée.

    Curieuse affirmation pour un président de la république dont la responsabilité ne peut –être engagée de par son statut.

    Quand je parlais de sagesse au début de ce billet...

    Le président  eut été plus inspiré de laisser agir les organismes chargés de faire la lumière sur les actes de son collaborateur et de prendre de la hauteur plutôt que de s'impliquer personnellement publiquement. Quand on est président...il faut agir en président.

    Les gens qui entourent le président de la république ne sont pas à l’abri d’être soumis à une enquête quand dans le cadre de leur fonction il y a suspicion de mauvais fonctionnement. C’est ce que la commission d’enquête sénatoriale a conclu. Ces personnes dépendent toutes d’un ministère et à ce titre sont susceptibles d’être soumises à contrôle. Ce qui a été fait. Ils ont d'ailleurs tous répondu à la convocation de la commission d'enquête sénatoriale.

    Emmanuel Macron a qualifié l'initiative de "démarche politique".

    C’est une évidence. Le sénat fait de la politique comme Emmanuel Macron en fait ainsi que son premier ministre. Quoi de plus normal ?

    Faudrait pas nous prendre pour des naïfs.

    Les prémisses d’une réforme de la constitution sont sur les rails. Là est aussi le contexte.  Le sénat a rappelé son rôle en l’assumant.

    HUMEURS DE MARS 2019 ( 2 ) - LE SÉNAT, L'ÉXÉCUTIF ET L'AFFAIRE BENALLA...

    (Image montrant la Constitution française avec le sceau de la République Française. CC-BY-1.0)

    CONCLUSION TOUJOURS TEMPORAIRE

    Car le sac des humeurs est encore plein...et il se vide lentement.

    Pour ma part je tire de tout cela les conclusions

    - que le président MACRON et le gouvernement ont une attitude qui laisse croire que l'exécutif  ne veulent pas être contrôlés et qu’ils sont tout puissants, appuyés en cela par une majorité parlementaire qui « suit » même si de temps en temps il y a quelques contradicteurs vite remis dans le « droit chemin »,

    - que nos institutions ne fonctionnent pas bien notamment depuis que le septennat a été transformé en quinquennat. Il n’y a même plus la possibilité d’avoir une cohabitation.

    - que la réforme constitutionnelle devra être observée avec attention pour ne pas que nous tombions dans le piège du renforcement d’un régime présidentiel qui ne l’est que trop. Actuellement, pas un ministre n’ose bouger le petit doigt sans l’accord du « chef Macron ». C'est en tout cas ce que je ressens quand aucun membre du gouvernement, sauf peut-être timidement le premier ministre, n'ose se prononcer sur les suites du "grand débat"...

    Sur cette réforme des institutions je reviendrai car je ne suis pas persuadé que, telle que la conçoit Emmanuel Macron, elle soit susceptible de permettre à notre pays un renouveau démocratique. Pour l’instant on entend parler de diminution du nombre de parlementaires sans véritables arguments que celui de faire des économies et qui ne tiennent pas à l’examen, d’une fusion du Sénat et du CESE qui à mon sens ne ferait qu’affaiblir la possibilité du parlement de contrôler l’exécutif. La récente affaire « Benalla » et les réactions de l’Exécutif (Élysée et Matignon) le montrent. Quand à la dose de proportionnelle aux élections législatives ce n’est qu’un leurre vu le pourcentage annoncé.

    Le sénat a eu donc raison d’agir ainsi face à un pouvoir qui impose, ne consulte pas et a mis en place des mesures avec brutalité que ce soit par la loi ou par des ordonnances : code du travail, CICE pérennisé, CSG, laminage du pouvoir d'achat des retraités, loi sur l’école, loi sur la sécurité, la réforme de la santé...

     

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