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GRANDE CONSULTATION CITOYENNE : L'ESPRIT, LA LETTRE ET LES ACTES - 3 sur 4
Je commence à écrire ce billet alors que le président Macron va cette fois rencontrer les maires du LOT à SOUILLAC.
Il paraît qu’il va faire cela douze fois dans les deux mois.
Je ne regarderai pas la prestation présidentielle, estimant qu’elle n’a plus d’intérêt pour moi. Ce sont après tout les maires qui sont concernés.
Après le tour de chauffe de ce mardi qu’il était intéressant de voir, je crois qu’on pourrait cette fois éviter de mobiliser 4 télés de la TNT pour chacune de ces réunions locales et laisser le soin à « France 3 région » de rapporter éventuellement les rencontres.
Continuer ainsi durant les deux mois va être lassant pour ceux qui auront le courage et le loisir de regarder.
Cela contentera peut-être les maires invités mais au delà de l’essai d’une reconquête de celles et ceux qu’il a jusqu’ici snobés, les maires, et pour faire montre de ses capacités d’être près du terrain , pas sûr que ce soit d’un intérêt flagrant pour population qui en est écartée tout comme d'ailleurs ceux qui sont à la base de tout ce remue "méninges": LES GILETS JAUNES. On ne peut que les en féliciter.
(auteur 383961, pixabay, CC0 domaine public)
UN GRAND DÉBAT POUR UN NOUVEAU CONTRAT ?
Revenons cette fois à la lettre elle-même que je relis à la lumière de ce que le président a pu affirmer dans son premier échange de mardi avec les maires de l’Eure.
Emmanuel Macron a affirmé qu’il voulait « bâtir un nouveau contrat pour la Nation ».
« Afin que les espérances dominent les peurs, il est nécessaire et légitime que nous nous reposions ensemble les grandes questions de notre avenir ».
A la lumière de ces deux intentions, il convient de les confronter aux propos écrits de cette lettre pour d’une part déterminer qu’elle est sa conception d’un nouveau contrat et d’autre part si les questions posées sont bien ouvertes pour qu’il n’y ait pas de tabous pour que ce contrat soit effectivement nouveau si d'aventure des propositions étaient prises en compte.
Cela veut donc dire que grâce au Gilets Jaunes et à leur mouvement, le président a considéré que le contrat initial devait être pour le moins modifié et au mieux devienne un « nouveau contrat » et que celui sur la base duquel il a été élu, il reconnaît qu’il ne convient pas.
Ce qui est écrit dans la lettre est-il de nature à permettre de croire que le Président est sincère et que seront pris en compte les éléments nécessaires pour qu’un nouveau contrat soit réel et accepté?Lors de sa première intervention devant les maires, j’ai perçu dans ses propos, conformes aux termes de sa lettre, l’ambiguïté qui consiste à dire qu’il n’y a pas de sujets tabous mais qu’il ne reviendra pas sur les réformes engagées.
Le débat tel qu’il est conçu est-il de nature à permettre, sans tabous, une expression de toutes et tous et doit –il ou non être suspecté d’une directivité qui ne permet pas qu’il ait réellement lieu ?Débattre sans tabous, peut-être, mais revenir sans tabous sur sa politique ne semble pas à l’ordre du jour. : « Pour moi, il n’y a pas de questions interdites. Nous ne serons pas d’accord sur tout, c’est normal, c’est la démocratie. Mais au moins montrerons-nous que nous sommes un peuple qui n’a pas peur de parler, d’échanger, de débattre.
Et peut-être découvrirons-nous que nous pouvons tomber d’accord, majoritairement, au-delà de nos préférences, plus souvent qu’on ne le croit.
Je n’ai pas oublié que j’ai été élu sur un projet, sur de grandes orientations auxquelles je demeure fidèle. Je pense toujours qu’il faut rendre à la France sa prospérité pour qu’elle puisse être généreuse, car l’un va avec l’autre. »
(auteur geralt, CC0 domaine public)
LES AFFIRMATIONS DE LA LETTRE
Je me contenterai de noter ici ce qui, à mon sens, est susceptible de me faire participer ou non au débat dont la complexité est évidente tant du point de vue de l’organisation (je n’ai rien vu bouger dans mon secteur) que de l’animation et la manière dont les synthèses locales seront faites, par qui et que vont –elles devenir avant de parvenir au président et à son gouvernement qui à l’évidence auront le dernier mot pour proposer ou imposer un "nouveau contrat".
Question : Car de quelle manière ce nouveau contrat sera-t-il soumis au jugement du peuple ?Rien dans le texte de la lettre ne l’indique ou plutôt tout indique que ce contrat ne lui sera pas soumis.
« Chez nous, un grand nombre de citoyens paie un impôt sur le revenu, parfois lourd, qui réduit les inégalités » :C’est une affirmation dont on peut aisément démontrer l’imprécision....16,34 millions de foyers 38 millions de foyers fiscaux payent l’impôt sur le revenu. 77,6 milliards c ’est le montant, en euros, des recettes que l’Etat a tiré de l’impôt sur le revenu en 2017. C’est plus de deux fois moins que ce que rapporte la TVA (188,7 milliards d’euros) Impôt que tout le monde paye.Il faudrait tenir compte aussi de cet impôt pour discuter fiscalité et inégalités. Il faudrait aussi parler des tranches d'imposition...
« Chez nous, l’éducation, la santé, la sécurité, la justice sont accessibles à tous indépendamment de la situation et de la fortune. » Sauf que les accès sont différenciés selon les moyens financiers que l’on a : c’est le cas au moins pour l’École, l’Université, la Santé,...
"Les aléas de la vie, comme le chômage, peuvent être surmontés, grâce à l’effort partagé par tous. Ce partage est-il effectif ? "On peut aisément répondre NON quand on sait la pratique de certaines entreprises et l'utilisation nouvelle qui est faite du nouveau code du travail.
(Liberte Egalite Fraternite - Thermidorimage - Own work -CC BY-SA 4.0)
"La question de la laïcité est toujours en France sujet d’importants débats. La laïcité est la valeur primordiale pour que puissent vivre ensemble, en bonne intelligence et harmonie, des convictions différentes, religieuses ou philosophiques. Elle est synonyme de liberté parce qu’elle permet à chacun de vivre selon ses choix.
Comment renforcer les principes de la laïcité française, dans le rapport entre l’Etat et les religions de notre pays ? Comment garantir le respect par tous de la compréhension réciproque et des valeurs intangibles de la République ?
C’est la loi de 1905 qui le permet et qu’il faut appliquer. Les nombreuses dérives mises en place par nos politiques montrent que bien souvent on a essayé et réussi à détourner cette loi et la LAÏCITÉ.
La laïcité n’a pas à être un « sujet d’importants débats ». C'est un principe constitutionnel au même titre que la Liberté, l’Égalité ou la Fraternité. La loi de 1905 n'est pas un contrat ni une entente conclue avec les Églises. Notre Constitution ne reconnait que des citoyens égaux et non des cultes.
Le 10 janvier 2019, juste avant la parution de la lettre, le président de la République, le premier ministre et le ministre de l’intérieur ont accueilli à l’Élysée douze invités (deux pour chacun des cultes catholique, protestant, orthodoxe, juif, musulman, bouddhiste) et ont exposée aux représentants des cultes les axes d'une réforme à engager autour de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’Etat. Une note de trois pages synthétise les contours de cette réforme destinée notamment à favoriser une meilleure organisation du culte musulman. Cette attitude n'est pas admissible et par le fait, poser ces questions consacrées à la laïcité transgresse ainsi les obligations constitutionnelles et la « Loi de séparation ».
La non-reconnaissance institutionnelle des cultes place tous les citoyens à égalité de droits et d’obligations. La citoyenneté ne se construit ni contre ni avec, mais sans les religions. La liberté religieuse n'a pas à être conçue comme un préalable à la liberté de conscience. La séparation a été un acte souverain de la République laïque mais pas un « pacte » négocié avec les religions. Et elle doit le rester.
( image créée par P. Patte à partir de l'image symbole de la république française créée par TaniaPS , CC BY-SA 3.0)
"Et chaque citoyen a le droit de choisir celles et ceux qui porteront sa voix dans la conduite du pays, dans la conception des lois, dans les grandes décisions à prendre. » Affirmation qui traduit que le système actuel satisfait le président alors qu’il dit pourtant lui-même qu’il faut le modifier. Un peu contradictoire sauf si l’intention est de modifier les règles à la marge pour que cela n’ait que peu d’incidences par rapport à la représentation non satisfaisante actuelle des citoyens.
(Palais Bourbon Palais-Bourbon, VIIe arrondissement de Paris. auteur kimdokhac — Flickr, CC BY 2.0)
« Je pense toujours qu’il faut rebâtir une école de la confiance, un système social rénové pour mieux protéger les Français et réduire les inégalités à la racine. » Pour l’École notamment de la confiance ce n’est pas le chemin que prend le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel BLANQUER. Pour ce qui est du système social rénové, la suppression progressive des cotisations sociales, la baisse annoncée des droits des chômeurs, les droits tronqués de la loi travail ne vont pas, pour le moment dans le sens de ces affirmations.
Après le listing de ces différentes affirmations, il faut bien constater qu’elles ne correspondent qu’à des généralités qui ne se basent pas sur une analyse fondée sur les réalités.
J’ai pu déjà le démontrer par ailleurs, ici même sur ce blog. J’y reviendrai.
A propos de la solidarité nationale et de l’impôt
L’impôt est au cœur de notre solidarité nationale.
Je passe sur le discours général.
« Mais l’impôt, lorsqu’il est trop élevé, prive notre économie des ressources qui pourraient utilement s’investir dans les entreprises, créant ainsi de l’emploi et de la croissance. Et il prive les travailleurs du fruit de leurs efforts. Nous ne reviendrons pas sur les mesures que nous avons prises pour corriger cela afin d’encourager l’investissement et faire que le travail paie davantage. Elles viennent d’être votées et commencent à peine à livrer leurs effets. Le Parlement les évaluera de manière transparente et avec le recul indispensable. Nous devons en revanche nous interroger pour aller plus loin. »
que je relie à
« Je pense toujours que la lutte contre le chômage doit être notre grande priorité, et que l’emploi se crée avant tout dans les entreprises, qu’il faut donc leur donner les moyens de se développer. »
L’impôt semble trop élevé donc pour les entreprises. Sauf à dire qu’ il a été mis en place par le CICE un assistanat généralisé qui ne cible rien et génère des pertes de nos moyens financiers qui ne sont pas à la hauteur des résultats mêmes ceux énoncés d’ici 2020 : 99, 8 milliards pour combien d'emplois créés? Coût évalué d'un emploi créé ou maintenu: 280 000 euros selon les hypothèses les plus optimistes...
Et je ne parle pas de l’irréaliste ruissellement de la suppression partielle de ISF, la Flatax et autres niches...
Tout cela dit à l’évidence que rien ne sera remis en question quant à la politique fiscale mise en place pour le développement économique : ISF, CICE, FLAT TAX, et que donc on ne reviendra pas sur l’attribution des milliards de l’ISF ou du CICE.
PREMIÈRES CONCLUSIONS
Avant que d’aborder les questions que le président pose dans sa lettre, je pense que malgré ses affirmations d’un débat ouvert sans tabous, il faut se dire que sauf à permettre, si les conditions sont bien réunies au niveau local, que chacun puisse vider son sac et débattre de tout, ce sera peine perdu pour que soient prises en compte des propositions qui pourraient être faites sur la fiscalité, le CICE enfermé que l’on serait dans une nasse qui limite dès le départ toute modification de la doctrine présidentielle en matière d’économie et de répartition de nos moyens publics.
Un débat stérile donc sauf pour ceux qui échangeront mais sans espoir de modifier le contrat sur ce sujet.
Pour ce qui concerne l’École, peut-être existe -t-il une marge de manœuvre.
Quant à la Laïcité, la détermination du président à faire fausse route par le fait même de convoquer en parallèle les représentants de 6 groupes religieux pour leur donner des indications sur une réforme de la loi de 1905 est une faute grave.
Les questions de la lettre semblent conforter les mailles de la nasse dans laquelle le président veut installer le "grand débat" dont nombre de ses conclusions qui ne seront pas en phase avec le projet du président. Celles qui à l’inverse conforteront le cadre fixé sans y apporter de modifications significatives sauf à la marge serviront de caution au fait que le débat a été profitable ce qui serait abuser le citoyen qui à terme ne sera pas dupe quand il lira le nouveau contrat imposé car rien ne dit qu’il sera soumis à leur approbation.
J’y reviens et poursuis...
( Henri Rousseau Le Navire dans la tempête Orangerie RF1960-27,
Travail personnel, 2002-12-18 - CC BY-SA 3.0)
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Tags : LOT, laïcité, lettre, affirmations, questions, solidarité nationale, impôt, grand débat