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François Hollande a lancé la refondation de l’Ecole
Prononcé, ce jour, à la Sorbonne, le discours du président de la république est empreint d’une forte détermination de refonder l’Ecole tout en faisant référence à nombre de sujets fortement médiatisés ces derniers jours comme la violence, les devoirs, les redoublements, la semaine de quatre jours et demi, la morale républicaine….
« Les devoirs seront faits à l'école plutôt qu'à la maison ». Cela devrait concerner le collège et pas le primaire. Les devoirs à maison sont interdits depuis la circulaire du 29 décembre 1956. Elle été régulièrement transgressée par de nombreux enseignants, sous l'œil bienveillant des parents.
(Paul-Joseph-Victor Dargaud (1850-1921), domaine public)
Le chef de l'Etat veut renforcer la lutte contre les violences scolaires :"Chaque fois que l'Education nationale subit une agression, c'est tout le pacte républicain qui est mis à mal » sans doute en référence avec les récents événements mis en avant par les médias. Il y a en la matière des solutions qui ont été travaillées .Encore faudra- t-il en mettre les moyens humains et pédagogiques.
Bien sûr, il a évoqué les redoublements estimant avec raison qu'ils ne sont "pas toujours utiles" et que leur nombre "devra être réduit". On ne peut être que d’accord mais ce problème sera sur la voie de la résolution quand on aura changé les moyens de la pédagogie, déterminé les objectifs de l’évaluation et mis en place des dispositifs efficaces de remédiation et de prise en charge immédiate de la difficulté scolaire qu’elle soit passagère ou profonde (Il ne dit pas ce que deviendront les RASED dans l’immédiat en attendant d’autres dispositifs)
Là où je trouve le président un peu « léger » c’est quand il parle de notation qui doit "doit indiquer un niveau plutôt que sanctionner ». Il faudra qu’il approfondisse le sujet, sa phrase est trop simpliste pour rendre compte de ce qu’il faudrait faire : ce n’est pas sur la notation qu’il faut se pencher mais bien sur l’évaluation qui est le véritable sujet de la refondation. La note n’est qu’un outil qui peut ou non exister. Le débat n’est pas là.
Il annonce que la scolarisation des enfants de moins de trois ans, doit être "relancée dans les zones en difficulté", afin de lutter contre l'échec scolaire des familles les plus défavorisées. Ce n’est pas suffisant. J’estime que le droit à la scolarisation des enfants de deux ans doit être remis partout. "Une zone en difficulté" n'est plus un bon concept . Il y a des familles en difficulté dans tous les quartiers d’une ville. Il est prouvé aussi que les critères de détermination des zones prioritaires sont complétement obsolètes. La Cour des comptes dit justement que les effectifs d’enseignants et les crédits sont répartis « Sans corrélation entre les difficultés scolaires constatées sur le terrain, moyens publics et effectifs d’enseignants devraient être alloués en fonction des besoins des élèves, ce n’est que très partiellement le cas». Des zones socialement favorisées se trouvent mieux dotées que les autres. Les moyens attribués le sont sur des critères dépassés depuis de nombreuses années et « selon des moyennes qui ne tiennent pas compte de la situation de telle ville ou tel quartier ». Il faut donc prendre avec prudence le terme « zone en difficulté » et faire un travail conséquent de remise à niveau des critères de détermination des difficultés sociales si on veut agir avec plus de justice et de finesse.
Le président, déplore des journées actuellement surchargées pour les élèves. "La réforme des rythmes" scolaires "n'est pas la clef de tout", mais "c'est le levier de la réussite", Il a raison mais quand il dit dans sa conclusion :
"Je suis favorable au retour à une semaine de neuf demi-journées. Nous ne pouvons pas nous plaindre de la baisse de nos résultats et ne pas voir que 144 jours de classe par an alors que nos partenaires européens sont à plus de 180", "c'est un handicap, et c'est une explication ».
C’est peut-être une explication mais pas la seule et il faut aller beaucoup plus loin. Comme je le disais ici même dans mon article du 8 octobre : « La vraie réflexion ne doit pas être de vouloir refonder l’école sur les seuls chiffres et critères désuets habituels : on veut garder par exemple 840 heures de cours par an. Pourquoi ? »
Si comme le dit François Hollande "Un projet éducatif est, par définition, un projet de société", alors il faut « révolutionner les rythmes et la pédagogie en osant bousculer les systèmes en place. » « Il faut commencer par les choix des programmes et des objectifs qui doivent refléter les priorités nationales d’instruction et ce qui doit être enseigné aux élèves en fonction de leur âge.
Une vraie refondation ne sera possible que si on abandonne tout de suite le débat actuel et tronqué des vacances scolaires. »
(Lire la suite sur http://quaiducitoyen.eklablog.fr/refondation-de-l-ecole-un-rapport-interessant-mais-a57567439)
Je suis d’accord avec lui pour dire : "Il y faudra du temps et des moyens." La refondation ne peut que se construire sur un terme assez long mais il faut tout de suite y mettre des moyens notamment lors de la prochaine rentrée scolaire en utilisant mieux des effectifs supplémentaires de personnels mais aussi pour une formation initiale et continue très conséquente.
Si comme il l’affirme "Le temps de la décision est venu et le temps de la concertation n'est pas achevé", alors il faut cesser de mettre en valeur les « broutilles » réductrices du véritable débat sur la rénovation, celles qui intéressent les médias comme l’allongement ou non des vacances scolaires et autres sujets aguicheurs mais secondaires au regard de l’essentiel.
J’attends pour ma part un « véritable plan de refondation de l’école qui doit être annoncé clairement et détaillé dans toutes ses étapes. » J’attends bien sûr « un budget de l’enseignement scolaire bien déterminé et programmé permettant d’effectuer des réformes de fond sur une période de cinq ans ».
Jeudi prochain, Vincent Peillon va dérouler, devant le Conseil supérieur de l'éducation, les axes du projet de loi d'orientation et de programmation qui sera "présenté en conseil des ministres avant la fin de l'année ».
On pourra juger dans le détail si les actes futurs seront suffisants et à la hauteur d’une véritable refondation et si il est tenu compte enfin des partenaires qui font partie du Conseil supérieur de l’Education.
Que la détermination soit avec nous...
Patrick PATTE
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