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CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE 6 : PROJET ET PROGRAMME FRANÇOIS FILLON 3 sur 4
J’aborde ici le deuxième violet du programme économique de François FILLON, à savoir la libéralisation de l’économie. Il dit pudiquement : « libérer l’économie ».
Qu’il y a t-il derrière cette idée ?Pour résumer, François Fillon veut, selon son « cadrage financier », en cohérence avec les axes développés précédemment, mettre en place des « Allégements sociaux et fiscaux dès le début du mandat pour renforcer la compétitivité des entreprises et redonner aux ménages des marges de manœuvre financières. »
(auteur stux, CC0 domaine public)
LIBÉRER L’ÉCONOMIE ET RENDRE COMPÉTITIVE LES ENTREPRISES
Rendre les entreprises compétitives est louable en soi mais encore faut-il prendre les bonnes mesures pour ce faire dans le contexte nationale et mondial actuel. Examinons donc ces mesures.
Concrètement il prévoit :
- baisse des charges pour les entreprises de 40 milliards afin de les rendre plus compétitives,
- baisse de 10 milliards des charges sociales et fiscales pesant sur les ménages. "Un forfait de 350 euros par salarié et par an, 700 euros pour un couple » soit un coût de 7,7 milliards d'euros.
Il prévoit aussi une modification du code du travail pour augmenter la flexibilité, rendre plus facile les licenciements, supprimer la durée légale du travail dont la référence sera celle européenne de 48 heures.
La baisse des charges des entreprises :
Sur la baisse des charges patronales, cela veut dire qu’après les 41 à 43 milliards dU CICE et la baisse de charges et impôts institués sous François Hollande, on continuerait la même politique avec encore 40 milliards de baisse de charges patronales sur tous les niveaux de salaires, voire 50 milliards pour aussi baisser l'impôt sur les sociétés (de 33%) à 25%, le niveau dit « moyen » européen.
C’est à mon sens, une mesure générale sans finesse qui met sur le même plan petites et moyennes entreprises qui, elles, payent « plein pot » les impôts et les grandes entreprises qui y échappent pour beaucoup et payent en moyenne bien moins car elles peuvent se payer des experts pour utiliser les niches fiscales dont monsieur Fillon ne propose d’ailleurs pas la suppression. Tout ceci bien sûr sans contrôle et sans en rendre compte comme pour le CICE.
Trois ans après son entrée en vigueur, un rapport sénatorial a fait un constat accablant du dispositif du CICE qui coûte 1 % du PIB de la France chaque année, sans qu’il soit possible d’en mesurer les effets tangibles.
Car l’illusoire théorie de rassemblement des français de François Hollande (pacte de responsabilité et de solidarité) pour appliquer une politique économique et de l’emploi mal maîtrisée basée sur la confiance au libéralisme soi-disant régulateur a été une grave erreur.
François Fillon veut poursuivre de la même manière que j’estime irresponsable.
(auteur PublicDomainPictures, CC0 domaine public)
Il va continuer à disperser des milliards dans la nature sans contrôle, sans demander des comptes sur l’utilisation des financements antérieurs notamment aux entreprises pour qui le CICE n'a eu qu’un effet plus que marginal sur l'emploi.
On connaît nombre d’entreprises, notamment des grands groupes, qui, dans ce cadre, n’ont absolument pas joué le jeu et ont même licencié.
Un rapport de l’OFCE* de décembre 2016 estime que ce système de crédit d’impôt a permis de créer ou de sauvegarder 140 000 emplois. L’Insee, de son côté, chiffre l’impact du CICE à 160 000 emplois entre 2013 et 2016.
Lorsque le gouvernement avait fait adopter le CICE, il avait mis en avant la nécessité de défendre l’industrie, les entreprises innovantes, les toutes petites entreprises. En un mot, toutes celles qui sont les plus exposées à la concurrence internationale et les plus fragiles. D’après le rapport, le CICE qui devait être un outil de soutien pour les plus petites entreprises, est en réalité « majoritairement capté par les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises, alors même que celles-ci représentent moins de 1 % des dossiers ».
À l’arrivée, le rapport constate « l’éloignement du dispositif par rapport à sa cible initiale ». C’est le commerce, et en particulier la grande distribution, qui est le premier bénéficiaire du dispositif, aux côtés de l’industrie. Les deux secteurs profitent chacun de plus de 19 % des aides. « Il est significatif que l’industrie ne soit que péniblement le premier secteur concerné (…). Moins d’un cinquième de la créance est donc destiné à la cible du CICE », dit le rapport.
Les chiffres :
- 43 milliards d’euros sur les années 2013 à 2015 (11,4 milliards d’euros en 2013, 17,3 milliards en 2014 et 14,5 milliards fin juillet 2015), sans effets du CICE observables sur l’investissement, la recherche-développement et les exportations.
- le CNRS fait état de 45 000 à 115 000 emplois sauvegardés ou créés. Une fourchette qui varie du simple au double.
Coût d’un emploi CICE selon les chiffres de cette époque : en prenant le chiffre de 140 000 créations ou maintiens d’emplois, hypothèse moyenne cela fait environ 300 000 euros l’emploi ! DU GRAND N’IMPORTE QUOI DONC.
Et François Fillon veut continuer, toujours sans contrôle et sans engagement...
De plus il ne suffit pas de rendre les entreprises compétitives par rapport au coût du travail.
Je rappelle que la baisse des charges du CICE et autres mesures d’allégement des charges ont rendu le coût du travail presque à égalité avec celui de l’Allemagne dans notamment l’industrie manufacturière mais pas partout, il est vrai. Tout dépend du secteur.
Pour qu’une entreprise vende à l’extérieur il faut aussi que ses produits intéressent. Il ne suffit pas d’offrir donc il faut qu’il y ait de la demande. Or au niveau européen voir mondial, la demande est en baisse dans nombre de pays.
C’est pour cela qu’il faut aider les petites entreprises à se développer ou se créer pour innover vers des produits « achetables » plutôt que de donner de l’argent à fonds perdu aux grands groupes.
Une fois encore, le manque de finesse de la distribution de l’aide ne concourra pas à cela.
(auteur skeeze, CC0 domaine public)
La modification du code du travail
L'abandon, par exemple, de la référence légale des 35 heures tout en soumettant le temps de travail à la négociation dans l'entreprise est dans le droit fil de la loi El Khomri aggravé.
N'ayant plus de référence, il n'y aura plus d'heures supplémentaires. Travailler plus pour gagner pareil. Pour les fonctionnaires idem.
A cela s’ajoute toute une série de mesures pour faciliter les recrutements avec des contrats de travails spécifiques pour les petites entreprises du type « contrat de mission pour une durée limitée » ou « contrats à causes de rupture prédéfinies ». En bref de l’intérim... Une clarification des règles du licenciement économique pour licencier plus facilement et à moindre coût.
Une flexibilité augmentée déjà commencée par la loi El Khomri sans augmentation bien au contraire de la sécurité à part une hypothétique possibilité de formation, tout en diminuant les indemnités chômage qui deviendront dégressives.
Une modification partisane qui n’équilibre pas la flexi sécurité mais fera de ceux qui travaillent des employés ou ouvriers corvéables et taillables à merci.
Une baisse de 10 milliards des charges sociales et fiscales au profit des ménages.
Il veut redonner du pouvoir d’achat aux français.
Ainsi il prévoit
- la Suppression de la cotisation salariale maladie (5,5 Mds€). François Fillon veut, par la suppression de ces charges sur les salaires, accroitre le pouvoir d’achat de 350 euros par salarié et par an soit environ 25 euros par mois.
- Augmentation des retraites inférieures à 1000 euros et des pensions de réversion soit 2,2 mds d’euros.
C’est positif mais comme la précédente mesure c’est peu par rapport à ce qui sera attribué aux français plus aisés qui sont en moins grand nombre.
Ainsi :
- Le rétablissement de l’universalité des Allocations familiales (0,8 Md€). Cela touchera les familles les plus aisées comme d ‘ailleurs le relèvement du plafond du quotient familial à 3000 euros (3,0 Mds€).
- La diminution des droits sur les donations, pour faciliter la circulation du capital. Cela se traduira par une réduction des droits en fonction de l’âge et par la diminution du délai entre deux donations de 15 à 10 ans (0,7 Md€). Est-ce bien nécessaire ?
- La réforme de la fiscalité du capital et de l’épargne par la suppression de l’IMPOT SUR LA FORTUNE pour un montant de 4,7 milliards
- Mise en place d’un taux unique d’imposition des revenus du patrimoine de 30% ce qui coûtera 2 milliards d’euros.
Soit au total 10, 4 milliards d’euros
Quand dans le même temps, il serait supprimé la référence légales des 35 heures qui servait de base pour déclencher les heures supplémentaires et que c’est la négociation qui dans l’entreprise qui en décidera, il ne faut pas être grand clerc pour savoir que ce ne sont pas les salariés qui dans certaines entreprise font le poids pour pouvoir résister au chantage à l’emploi que pourraient faire certains patrons.
Tout cela n’augmentera donc pas le pouvoir d’achat des salariés qui gagnent le moins avec les 350 euros annuels promis d’autant que l’augmentation de la TVA va faire aller vers la hausse les prix à la consommation.
LE FINANCEMENT DES MESURES :
Elle se fera donc par une augmentation de la TVA de 2 points, de 20 à 22% soit entre 14 et 16 milliards d’euros. Le reste sera pris sur des économies à faire sur les budgets de l’Etat.
(auteur stevepb, CC0 domaine public)
MON AVIS POUR CE QUI EST DU CONTENU DU PROGRAMME ÉCONOMIQUE
La redistribution des économies soit 100 milliards se fait dans l’injustice la plus flagrante et de manière partisane en direction de la population aisée.
Tant au niveau des petites retraites et des salaires notamment les plus petits, ce sont les miettes que l’on donne soit 7, 7 milliards d’euros et encore les salaires les plus aisés bénéficieront dans cette enveloppe de l’incidence de la suppression des charges sur les salaires.
Pour les contribuables les plus aisés et très aisés (ISF, épargne et patrimoine) ce sera 10,4 milliards d’euros en plus.Un premier déséquilibre qui donnera le plus à ceux qui ont le plus.
L’augmentation du pouvoir d’achat est une illusion. L’augmentation du taux de la TVA de 2 points qui rapportera 14 à 16 milliards gommera rapidement les incidences des 350 euros annuels de la baisse des charges sur les salaires.
A cela il faut ajouter que nombre de salariés verront sans doute baisser les revenus des heures supplémentaires qui pourraient ne plus être payées en fonction « des accords d’entreprises » , la référence légale du temps de travail à 35 heures n’existant plus au profit de celle européenne de 48 heures. Une grande incertitude de plus donc pour ceux qui travaillent.
Dans le même temps, il faudra supporter la dégradation des services publics et la baisse du niveau des retraites et en particulier celles des fonctionnaires qu’on veut sans nuances aligner sur le régime général, l’intention de François Fillon étant de mettre les français du public et du privé en concurrence non pour améliorer vers le haut les situations de chacun mais mettre en place, au nom d’une justice frelatée, une politique de l'avenir des retraites simpliste et inadaptée qui ne prend pas en compte les situations très diverses des salariés qu’ils soient du public ou du privé.
On peut ajouter aussi ce qui n’est pas le moindre des reculs, la disparition de la notion de pénibilité dans le travail. Mais peut-être ne sait-il pas ce que c’est.
(auteur djedj, CC0 domaine public)
Ces mesures peuvent-elles relancer la compétitivité des entreprises, relancer l'emploi? A voir...
Verdict au prochain épisode après avoir déroulée les autres points du programme...
A suivre...
*OFCE : Observatoire français des conjonctures économiques. Pour plus de précision sur cet organisme voir le site de wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Observatoire_fran%C3%A7ais_des_conjonctures_%C3%A9conomiques
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Tags : code du travail, pénibilité, Fillon, programme, économie, taxes, libéral, compétitivité