• CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE 6 : PROJET ET PROGRAMME FRANÇOIS FILLON 1 sur 4

    J’en viens enfin à l’essentiel : le programme.

    Je ne passerai pas tout en revue du programme mais m’attacherai aux points qui sont, à mon sens, importants comme le social et l’économique, la santé, l’Ecole, la sécurité et l’Europe... Je creuserai ce qui m‘apparait utile d’approfondir.

    François Fillon résume son programme lui-même ainsi :

    "Libérer l'économie, restaurer l'autorité de l'État et affirmer les valeurs de la France".

    Ma première remarque est de dire que dans le projet Fillon c’est l’économie qui prime et c’est, selon lui, le seul projet qui peut sauver la France. S’en est devenu un leitmotiv, un slogan, une obsession presque quand on l’entend dans ses discours comme si seule l’économie pouvait apporter des solutions à tous nos problèmes. Le tout est dans la perception des problèmes que peut avoir le candidat de la droite.

    A mon sens un bon programme économique ne peut être qu’en concordance qu’avec un bon programme social qui tient compte des préoccupations des habitants de la France et pas seulement d’une partie de ceux-ci.

    CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE  6 : PROJET ET PROGRAMME FRANÇOIS FILLON 1 sur 3

     (composition personnelle à partir image auteur Prawny, CC0 domaine public)

    Ceci étant dit, encore faut –il avoir quelques notions d’économie ce qui n’est pas forcément le lot du citoyen « lambda ». Avant donc de faire, je me suis documenté et il faut bien dire que sans quelques informations il est difficile de faire une analyse.

    Encore faut-il aussi que le candidat donne bien tous les éléments qui le permettent et notamment l’équilibre des recettes et des dépenses et bien entendu les résultats attendus de ses choix. Ce n’est pas si simple.

    Pour le reste c’est plus facile si on arrive à déterminer ce que ce programme va apporter comme justice sociale auprès des habitants du pays.

    Ce préambule est valable pour tous les candidats.

    LE PROGRAMME ÉCONOMIQUE FER DE LANCE DU PROJET FILLON

    Encore faut-il que ce programme soit adapté à la situation réelle du pays et que son diagnostic d’une France qui va mal est le bon.

    François Fillon : « Mon projet est puissant et conquérant : c’est celui du redressement national. Il est réaliste et sincère, il ne cède pas à la démagogie et aux illusions ; son financement est cadré. »(...) « L’urgence est de libérer notre force économique qui étouffe sous les normes et les charges. Cette libération sera le tremplin de l’emploi.

    Il faut restaurer massivement la compétitivité de nos entreprises et desserrer les contraintes qui les étouffent ; il faut radicalement moderniser notre marché de l’emploi ; encourager l’investissement et en particulier l’investissement français ; il faut défendre nos industries, et apporter un soutien particulier à notre agriculture qui souffre. 

    Il faut, en parallèle, redonner à l’Etat sa force d’intervention, et aux agents publics leur fierté. La bureaucratie doit faire place à une action publique innovante, permettant de redresser les comptes publics dont l’équilibre est la clé de notre souveraineté et de notre solidarité. »

    François Fillon veut donc imposer, y compris par ordonnance dès le début du quinquennat, un certain nombre de mesures aux français pour "sauver" la France avec comme objectif de « libérer l’économie » pour la rendre plus efficace.

    Il a auto-proclamé "radical" son projet économique. Je ne le contredirai pas sur ce point.

    Radical veut-il dire efficace ? Là est la question essentielle.

    La force économique, comme il dit, ne se décrète pas. Elle se construit si on en prend tous les tenants et aboutissants avec finesse ce qui n’ a pas été le cas des mesures de François Hollande et ce qui n’est pas le cas des mesures de François Fillon qui continue dans la même ligne, celle de l’échec annoncé.

    Le programme économique et son cadrage financier peuvent être trouvés sur son site.


    En l’examinant, j’ai constaté d’une part que nombre de points sont peu précis notamment sur les détails de ses économies et leur faisabilité. De la même manière ses recettes me semblent pour le moins sujettes à des paris de croissance qui ne sont pas réalistes.

    Mais entrons dans le détail.

    Il présuppose aussi que nos services publics ont trop de personnels par rapport aux autres pays de l’Europe ce qui est inexact.

    J’y reviens

    CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE  6 : PROJET ET PROGRAMME FRANÇOIS FILLON 1 sur 3

    (auteur Clker-Free-Vector-Images, CC0 domaine public)

    100 MILLIARDS D’ÉCONOMIES SUR 5 ANS SUR LES DÉPENSES PUBLIQUES.

    100 me semble un chiffre bien rond qui relève du slogan de campagne. Pourquoi par 103 ou 87 en fonction de calculs réels ? En refaisant les calculs je n’en ai trouvé que 85...

    Son objectif : baisser le déficit public.

    Ainsi, il affirme dans son cadrage financier  : « Ce cadrage permet de confirmer

    qu’en faisant ensemble les efforts nécessaires, nous pouvons d’ici à 2022, fin du prochain quinquennat, ramener le chômage à 7%, revenir à l’équilibre budgétaire et ainsi être en mesure de commencer à rembourser la dette qui s’est accumulée depuis plus de 30 ans et qui pèse sur l’avenir de nos enfants. »

    Une première remarque quant à la dette. Il est vrai qu’elle ne date pas d’hier.

    Néanmoins je me permets de faire remarquer que si la dette est à ce jour de 2160,4 milliards d'euros, l’augmentation sous la gouvernance de Nicolas Sarkozy avec comme premier ministre monsieur François Fillon est de 597 milliards (au 30 septembre 2012).

    Et en 2017, François Fillon propose 100 milliards d’économie, « une paille » par rapport aux 597 milliards d’accroissement de la dette de son quinquennat gouvernemental. (En 2007 = 1 221,1 milliards. En 2012 = 1 818,1 milliards). Il me semble que l’on puisse avoir un doute sur la capacité de monsieur Fillon de faire des économies tang il est vrai que sous sa gouvernance les cadeaux aux plus nantis ont été légion.  

    Où seront faites les économies ?

    • Suppression de 500 000 Postes de la fonction publique soit 15 milliards.

    François Fillon pense donc que, dans certaines activités, il y a trop de fonctionnaires. C’est son point de vue mais ce n’est pas le mien. Il ne détaille pas dans quelle branche des fonctionnaires il va couper.

    « De façon transverse à l’ensemble des administrations publiques, le passage du temps de travail à 39 heures des trois fonctions publiques proposé dans mon projet permettra à terme de réduire le nombre de postes de fonctionnaires jusqu’à 500 000, contribuant de façon importante aux économies, avec un potentiel de l’ordre de 15 Mds€ »

    Que l’on puisse dire que les effectifs de la fonction publique puissent être réorganisés pour une meilleure efficacité, cela ne me gêne pas. Mais la solution pour lui de « maintenir » la capacité du service public c’est une hausse du temps de travail à 39 heures des fonctionnaires restants cela me semble problématique. Le candidat de la droite espère ainsi qu’avec moins de fonctionnaires, le service à rendre à la population sera le même.

    Premier problème : On pourrait rappeler ce qu’il semble complètement oublier dans sa dogmatique chasse aux économies, que la fonction publique est très directement au contact avec nombre de problèmes vécus par les français : les policiers, les pompiers, les infirmières, les enseignants sont au bout de ce qui est supportable quant aux conditions de travail, au manque d’effectif avec des salaires qui ont été bloqués pendant 6 ans, depuis 2010, grâce à lui d’ailleurs (le déblocage a eu lieu en février 2016 avec une augmentation de 1,2% !). J’ai pu voir dans un reportage télévisé de quelle manière il considère ceux des personnels de santé d’une maison de retraite qui ont des problèmes et comment il répond aux préoccupations par une attitude qui frise le mépris avec une froideur qui le renvoie toujours à sa doctrine de « l’économie avant tout : à voir sur Youtube (https://www.youtube.com/watch?v=69QyiNFy5Hs).

    En bref, il n’a pas l’intention d’améliorer quoi que ce soit dans la prise en charge et des personnes âgées ni d’ailleurs d’améliorer les conditions matérielles et humaines de prises en charge des patients dans les hôpitaux. Dans son programme il annonce en effet : « une réforme ambitieuse de la carte hospitalière sera également nécessaire, gage à la fois de maîtrise des dépenses et de qualité des soins, car trop souvent le conservatisme dans ce domaine génère à la fois du gaspillage et une mauvaise performance ». En bref cela veut dire, aucun moyen humain en plus, le passage aux 39 heures...une gestion comptable technocratique renforcée pour faire des économies.

    J’y reviendrai quand on abordera le volet santé du programme.

    CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE  6 : PROJET ET PROGRAMME FRANÇOIS FILLON 1 sur 3

    (auteur geralt, CC0 domaine public)

    Le deuxième problème, c’est qu’il n’a pas chiffré le surcoût engendré par le retour aux trente-neuf heures pour les fonctionnaires. Or, si l’on paie normalement les heures supplémentaires, des économistes ont calculé qu’on aboutirait à des dépenses qui pourraient atteindre un ordre de grandeur égal, voire supérieur aux 15 milliards d’euros de réduction des dépenses annoncés par François Fillon. Ou alors, la proposition de François Fillon est bien que les fonctionnaires travaillent plus, pour gagner autant.

    Il n’y a pas d’autres solutions.

    Cela touchera les personnels des 3 fonctions publiques d’état.

    Troisième problème : cela reviendrait donc à ne pas remplacer neuf départs à la retraite sur dix au cours du prochain quinquennat dans tous les ministères, établissements publics, collectivités locales et hôpitaux. C’est complètement irréaliste vu la charge de travail des personnels concernés.

    Car François Fillon ne précise pas les endroits où les effectifs seront réduits.

    Pour argumenter cette réduction drastique, Monsieur Fillon veut faire croire qu’en France nous avons plus de fonctionnaires que dans les autres pays.

    Il joue avec les chiffres pour étayer une théorie qui ne tient pas devant une analyse honnête de la situation. Lui se base sur le nombre de fonctionnaires ramené à la population active. Cela veut donc dire que ceux qu’on nomme inactif ne comptent pas : jeunes de moins de 15 ans, étudiants et retraités ne travaillant pas en complément de leurs études ou de leur retraite, hommes et femmes au foyer, personnes en incapacité de travailler... C’est de la tromperie...

    De ce fait, comparer avec l’Allemagne ou d’autre pays n’a aucun sens si on ne considère pas toute la population.

    En réalité, la France ne compte guère plus de fonctionnaires que les autres pays de l’Union européenne. Tout dépend de la manière dont on compare les chiffres.

    Et puis, le nombre de fonctionnaires en soit ne signifie pas grand chose : « il faut le rapporter aux services publics rendus, aux spécificités de l’aménagement du territoire. La densité de population de la France est inférieure de deux fois à celle de l’Allemagne. » « Rapporté à la surface du pays, il convient de remarquer que la France dispose de bien moins de fonctionnaires au km² que l’Allemagne : 8,4fonctionnaire/km² contre 13,5 fonctionnaires/km² outre Rhin. Mais bien plus que la Suède (2,5) ou le Royaume Unis (6,3) mais à peu près autant que le Portugal (7,7) »

    « La France dispose de 82 fonctionnaires pour 1000 habitants à peine plus que la Belgique (76/1000) mais bien moins que la Finlande (127/1000) ou le Danemark (144/1000).

    Ramené à sa population totale, notre pays est donc loin d’avoir le plus grand nombre de fonctionnaires.

    On peut ajouter aussi que le nombre d’emplois cumulés dans le secteurs de la santé de l’éducation et de l’administration publique en France et Allemagne et au Royaume Uni rapporté à la population sont très similaire (respectivement, 125, 126 et 126 /1000).

    Les services publics allemands et britanniques sont bien plus privatisés avec des taux d’emplois privés dans les services publics de respectivement 52% et 65% contre 34% en France. 

    L’Italie, la Hongrie, le Portugal emploient plus de 75% de fonctionnaires pour faire fonctionner leurs services publics. Sans parler du Danemark ou de la Finlande où 94% et 97% des travailleurs des services publics sont des fonctionnaires.

    Si on continue de comparer avec l’Allemagne, les enfants Allemands commencent l’école à 6 ans alors qu’en France c’est 3 ans , ce qui implique forcément plus d’enseignants, par exemple.

    Les hôpitaux allemands, financés par l’argent public, ont du personnel qui n’est pas comptabilisés dans les effectifs de la fonction publique.

    CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE  6 : PROJET ET PROGRAMME FRANÇOIS FILLON 1 sur 3

    Xavier Timbeau, directeur principal à l’OFCE (L'Observatoire français des conjonctures économiques), propose de comparer le nombre total de personnes offrant des services non marchands (santé, éducation et administrations), toujours ramené au nombre d’habitants. Les pays nordiques ressortent encore largement en tête. La France se situe au même niveau que les autres grands pays industrialisés et même derrière les Etats-Unis. Si on regarde les chiffres sur l’éducation, la France semble avoir fait "le choix délibéré de dépenser moins pour éduquer moins", selon Xavier Timbeau.

    Avec 30 emplois publics pour 1.000 habitants cela qui porte son taux d’encadrement à des niveaux faibles: seulement 5 enseignants pour 100 étudiants dans le supérieur, et 5 professeurs pour 100 élèves dans le primaire, soit le niveau le plus bas de l’OCDE.

    C.Q.F.D.

    Pour justifier sa baisse du nombre de fonctionnaires, François Fillon met en avant le fait que d’autres pays comme la Suède, le Danemark, le Canada ou le Royaume-Uni, ont engagé ce type de politique avec succès.

    Mauvaise pioche...

    Les statistiques de l’OCDE montrent que l’effet est temporaire : aujourd’hui, dans tous ces pays, la part des fonctionnaires dans l’emploi total est plus élevée qu’en France !

    Vouloir aggraver les conditions de travail actuelle en ajoutant au manque d’effectif actuel comme dans la santé et l’éducation une charge horaire plus importante c’est risquer de provoquer un ras le bol dans le personnel et de provoquer une accentuation de l’effondrement de la qualité d’un certain nombre de services publics avec des incidences graves sur la vie des français.

    S’il y a des économies à faire il faudra chercher ailleurs.

    Et si on cherche bien on trouve... J'ai des pistes.

     

    A suivre...

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